LE CARNAVAL
Étymologie :
Le mot « carnaval » apparaît sous cette forme en français en 1549 pour exprimer le sens de « fête donnée pendant la période du carnaval ». Mais il est forcément plus ancien !
Dérivé de l'italien carnevale ou carnevalo, le mot Carnaval a 3 origines possibles :
- Du latin carnelevare, formé de carne « viande » et levare « enlever ». Il signifie donc littéralement "enlever la viande".
- Des étymologies fantaisistes ont été jadis avancées, telle que « caro vale ! » qui veut dire « adieu la chair ! ».
- Une autre hypothèse propose carrus navalis, en relation avec le Bateau d'Isis (en Égypte).
Jusqu'au XIXème siècle, en France, on trouve aussi le mot « carême-prenant » (ou caresme-prenant, quaresmeprenant, etc.) (cf. Molière ou journal de Pierre de l'Estoile)
En Provence, on dit « carême entrant » (donc nom lié à la religion). "Le carnaval" ou "Lou carnabal" "Lou cornobal" ou "Lou carnavau" ou "Lou carnava" " Lou carnavas" ou "Le
caramentran" ou "Lou carmentran".
Du mot « carnaval » dérivent :
- l'adjectif « carnavalesque » (relatif au carnaval),
- mais aussi certains régionalismes tels que « carnavaleux » (désignant un participant au carnaval)
- et « carnavalier » : un artiste créant des œuvres pour le carnaval tels que chars, des géants, des grosses têtes, etc. Les « carnavaliers » les plus célèbres de France sont établis à Nice, où le métier se transmet de père en fils depuis 1870 et où ce mot est traditionnellement utilisé.
Historique :
Le carnaval est une survivance de rituels venant du fonds des âges (d'abord païens puis intégrés dans des fêtes religieuses) partagés par de très nombreux pays à travers le monde :
- Fêtes d’Ibis (symbole du dieu Thot) chez les Égyptiens,
- cérémonies en l’honneur de Dionysos chez les Grecs,
- Fête précédant la période de carême dans l’église chrétienne ("carême entrant")
- Fête des solstices d'hiver et d'été
- Li Bacanalo / Les Bacchanales : établies par les Égyptiens en l'honneur de Bacchus (Dieu des ivrognes) et Mélampe (roi-mage qui se fit dieu à sa mort), elles se transmirent en Grèce antique vers 1400 avant JC. C'est à Athènes qu'on les célébrait : on allait en ville à moitié nus, en faisant des cris de bêtes et en embrassant les gens.
- Li Lupercalo que les Romains célébraient le 15 février (3e jour des fêtes de Pan) en l'honneur de la louve qui avait allaité Romulus et Rémus.
- Li Saturnalo, de Saturne dans l’antiquité romaine : les 16 et 17 septembre, en mémoire de la liberté et l'égalité qui régnaient quand Saturne était roi.
- etc...
La signification du carnaval est double :
- il célèbre à la fois : la sortie de la nuit, du chaos, du froid, de la période sombre de l’hibernation (lors de l’équinoxe de printemps) ; et donc le retour du soleil, la victoire de la lumière sur la nuit et le chaos, le réveil de la nature, le retour des âmes des défunts, la sortie de l’hibernation du monde sauvage, la germination de la terre…
- et en même temps : la liberté !
C'est un grand défoulement collectif, mouvement de libération, où tout s’inverse, où tout devient possible : les esclaves se sentent libres, les hommes se déguisent en femmes, les pauvres en seigneurs, les femmes en hommes, le peuple se fait juge, le joyeux drille devient curé…
NB : Le plus grand carnaval du monde : Rio de Janeiro au Brésil (plus d'un million de personnes).
Le plus long : Carnaval de Limoux dans le sud-ouest de la France (3 mois).
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Le Carnaval en Provence, qu'es aco ?
En Provence, il y a deux types de carnaval :
- Le carnaval spectacle : défilé de chars...
- Feu : On brûle le carmentran en chantant à
tue-tête ! Tout le village participe à l'action.
Le carmentran est un énorme personnage qui symbolise tous les malheurs,
les soucis, les angoisses que les gens ont eu dans l'année. On le brûle
donc après une sorte de cortège funéraire pour se débarrasser
de toutes ces mauvaises choses > Personnification de tous les maux de l'année...
Le carnaval était une des fêtes les plus populaires en Provence. Aujourd'hui, bien que souvent touristique ou folklorique, cette fête traditionnelle continue de vivre de manière authentique dans certains villages.
Pendant la durée du carnaval, tout le monde et surtout la jeunesse s’en donne à cœur joie ! Dans une ambiance festive et exubérante, le but étant de rire, de s’amuser, cela est souvent source de débordements (bien que mal vu par les autorités civiles et religieuses, cela est néanmoins toléré). Les hommes sont souvent vêtus de hardes ou de vêtements féminins, les jeunes gens, le visage grimé ou masqué, parcourent les rues en folles farandoles. Quasiment tous les excès sont permis :
- Les mauvaises plaisanteries :
- on se rassemble à la fenêtre d'un mari cocu (ou supposé l'être), on lui chante la vérité et ses mésaventures
- on prépare la "tardoule" (huile, suie et plumes) jetée dans la maison d’une malheureuse victime.
- Une autre plaisanterie qui était assez courante est celle racontée par L. M. BLANC dans son livre, La vie à Allauch à la fin du XIXe siècle, p.31 : "un soir, rue des Michels, alors que le boulanger était encore au premier étage de son four, deux jeunes farceurs se postant sous sa fenêtre l’appelèrent ; ils tenaient en main "la sinso" ou "le patarassoun", ce chiffon lié à l’extrémité d’une longue canne et servant au nettoyage sommaire du four. Comme d’habitude alors, l’ustensile trempait dans le ruisseau et quand le boulanger parut à la fenêtre, il fut gratifié d’un barbouillage du peu ragoûtant instrument".
- Les danses : les "fieloua" (quenouilles), la danse des folies d'Espagne (des Turcs), les "boufets" (soufflets dans le derrière), ...
- Et on brûle Carmentran ! (pauvre pantin qui incarne tous les maux de l'année condamné à la peine la plus sévère)
En même temps, on trouve des costumes en peaux de bête, des personnages cornus, des confettis représentant les grains de blé, des mariés inversés (homme-femme), les bouffetaïres avec leurs soufflets et leur farine, des flambeaux…la communauté revit et danse autour du feu où se consume le bonhomme Carmentran… et l’année peut recommencer.
Les carnavals de la région Provence : Normalement fêtés entre l'épiphanie (6 janvier) et mardi-gras (fin-février/début mars), certains carnavals ont lieu également au début du printemps et certains se font même désormais l'été.
- Le carnaval de Nice (06) [depuis 1873] : février/mars >>> Défilé de chars avec des personnages géants
Mais aussi de Cagnes-sur-Mer (06), de La Ciotat, de Marseille (13), ...
- Le carnaval de Menton (fête du citron) (06) [depuis 1875] : février/mars >>> Défilé de chars décorés avec des citrons et des oranges sur un thème différent chaque année
- Le carnaval de Plan-de-Grasse et de Vence (06) et Château-Arnoux-Saint-Auban (04) : février/mars >>> Lei boufetaïre
- Le carnaval de Murs, de Bédarrides, de Mondragon et de L'Isle-sur-la-Sorgue (84) : mars (Voir une vidéo) >>> Où l'on brûle Carmentran et on chante les fielouso...
- Le carnaval de Lacoste et de Carpentras (84) : mars >>> Où l'on brûle Carmentran
- Ballet des figues à Robion (84) [depuis plus de 200 ans] : mars >>> Oreillettes et figues sèches flambées dans un pot de chambre... puis on brûle Carmentran
- Le carnaval de St Tropez (83) et Martigues (13) >>> Où l'on danse les fieloua
- Le carnaval de St Rémy de Provence (13)
- Le carnaval d'Aix-en-Provence (13)
- Le corso fleuri de Vaison-la-Romaine (84) : avril >>> Défilé de char fleuris en musique
- Le corso fanfare d'Apt (84) : mai >>> Défilé de char en musique
- Les fêtes du Drac à Mondragon (84) : mai
- Lou càrri de Mazan (84) [depuis 1725] : une fois par génération, juillet/août. >>> Il s'agit d'une journée des revendications accordée au peuple par les deux co-seigneurs et qui se perpétue encore tous les vingt ans sous la forme d'un défilé historique en costumes d'époque, avec chants et musique.
- Les carreto ramado : juin à mi-septembre
+ Quelques carnavals provençaux qui ont disparu :
- Au Crestet (84), les participants du village se déplaçaient dans les maisons des voisins et de tous les habitants (particulièrement les gens pas sympa) ; il fallait les reconnaître en leur donnant des oeufs > repas. Aujourd'hui, il y a encore une descente aux flambeaux au solstice d'hiver.
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Les CHANTS de Carnaval : À cette occasion carnavalesque, on joue de la musique et on chante
de multiples chants
- Le plus connu est "Adiéu Paure Carnavau"
(Vous savez ?! sur l'air de "Bonne nuit les petits" qui nous vient de la composition "Que ne suis-je la fougère" d'Antoine ALBANÈSE...)
- Le chant di boufetaïre : "Lei boufet soun rout, soun rout ma mignouno, Lei boufet soun rout, soun recoumouda,
La La La" (en mode mineur modal)
- Le chant des fieloua : "Eisaminas noste arlequin, Que n'es feiniant e libertin. S'a soun àbi tout pedassa, Dèu gramacia la soucieta... / Quan aven ges d'argènt, anan chez la vesino, Prestas-nous cinq sou pèr ana béure un coup." (en mode majeur)
- "Bèu Caramentran / Beau Carnaval" (> 1891 ?) [d'A.MAGNE]
- "Li Calabrès / Les Calabrais" (1861) [d'A.MAGNE]
- Chansons officielles du Carnaval de Nice : une création par an depuis 1873 !
- Et aussi : "Carnabal qu'ey arribat / Carnaval qui est arrivé", "Dimars gras qu'a nau moutous / Mardi-gras qui a neuf moutons", "Lous dus coucuts / Les deux cocus", "Carnabal si abès sabut / Carnaval si j'avais su", "D/", "D/", "D/", "D/", "D/", "D/", "D/", "D/", "La Coucudo et Capcarrat" de Louis VESTREPAIN (1809-1865)
- Etc...
Les DANSES de Carnaval :
- Lei boufetaïre / Li bouffet (soufflets) : La danse au soufflet, dite la danse des bouffets, était à l'origine un « bransle burlesque », dansée uniquement par des hommes en période de carnaval. À la tombée de la nuit, des jeunes gens portant une chemise de nuit de femme, surgissaient avec des soufflets et soufflaient dans les jambes des filles. Est-ce le rappel du supplice des condamnés à être enflés par des soufflets, ou la plaisanterie sur le feu intérieur qu'il faut éteindre, comme les paroles l'indiqueraient ou dans le but de chasser les impuretés accumulées pendant la fête, soit par de bons repas, soit par des tromperies, ou bien des rites païens à la veille du Carême. « Lous bralhès d'au buffet » se dansait sans culotte et sans cotillon, afin que le soufflet soit directement en direction de la partie la plus « polluée » des danseurs...
- Les fieloua / fielouso (quenouilles) : "La danso di fieloua se fasié à l'entour de l'estang de Berro. Dins aquesto danso, lis ome soun vesti en femo. I'a un arlequin prouvençau tambèn, emé un abi tout petassa perdequé chascun i'a pausa soun moussèu de tissu, que mèno la chourmo. La danso se debano dins li carriero dóu vilage." Cette danse traditionnelle serait originaire de St Chamas (13).
- La farandoulo (suite de farandoles)
- La danse des folies d'Espagne (des Turcs)
- Charivari
- Etc...
Les INSTRUMENTS du Carnaval :
- Les coucourdes : Courges séchées. On souffle ou on chante dedans, faisant vibrer une fine membrane (comme un kazoo).
- Les mirlitons
- La langue de belle-mère (ou sans-gêne) : Sorte de sifflet qui se déroule en faisant une note nasillarde...
- Grelots
- Multiples percussions
- Violon râcloir
- Etc...
Bibliographie :
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