MUSIQUE >> ANALYSE 
Jean-Henri FABRE /
Jan-Enri FABRE
(1823-1915)
"Le Savant, le Poète Félibre, l'Artiste Musicien"
Jean-Henri (Casimir) FABRE /
Jan-Enri FABRE
(21 (ou 22)/12/1823-11/10/1915)
"Lou Felibre di Tavan" :
Majoral du Félibrige en 1909
25 chansons
(+ 25 sans musique retrouvée)
+ 4 noëls
NB : Au cours des dernières années de sa vie,
Jean-Henri FABRE écrit des comptines, des rondes, des noëls,
dont il compose aussi la musique
sur son petit harmonium à l'Harmas,
et se passionne pour le Provençal.
Il lit Frédéric MISTRAL et publie lui-même
un recueil de poèmes en provençal, l’Oubreto prouvençalo (1909),
dont la plupart ont pour thème la nature.
« La poésie est partout, même dans le terrier d’un scorpion. »
écrit-il à Frédéric MISTRAL en 1906.
surnommé "Le virgile des insectes"
et "L'homère des insectes"
L'Harmas à Sérignan-du-Comtat (84)
+ "Le son des cigales ! La musique de l'eau !"
Aujourd'hui, en hommage à Jean-Henri FABRE,
éminent naturaliste et entomologiste,
le parc Micropolis qui fut créé en 2000 à Saint-Léons (12),
sa ville natale, sous la forme d'un hologramme,
le son de "sa" voix guide les visiteurs
dès leur entrée dans la cité des insectes.
+ Le Naturoptère à Sérignan-du-Comtat (84). |
Chansons sur les insectes et les animaux : |
Autres thèmes : |
* Chansons en provençal :
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* Noëls :
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* Chansons en français :
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- Le troglodyte (04/12/1899)
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+ Chansons sans musique retrouvée ou composée par la suite par un autre compositeur :
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[Remonter]
* Biographie de Jean-Henri FABRE
/ Jan-Enri FABRE, concernant la musique
(21 ou 22/12/1823-11/10/1915) :
« Ma musique de Barbare… » Ainsi définissait-il sa propre musique !
Et oui, Jean-Henri FABRE était également musicien et compositeur. Outre son génie scientifique, ses talents d'écrivain, de poète, sa passion pour la langue provençale, il aimait également composer de la musique, jouer et chanter en famille. Ainsi, au milieu de ses nombreux ouvrages, une centaine de manuels pédagogiques, ses souvenirs entomologiques, il a également rédigé un petit recueil de poésies, de noëls et de chansons en provençal et en français, qu'il a mis lui-même en musique.
* Sa formation musicale :
Au milieu de ses nombreuses activités, J-H. FABRE avait trouvé le temps d’apprendre le solfège et l’harmonie, en autodidacte, à partir d'une méthode de solfège commandée à Paris. Il a écrit par ailleurs : « L'étude solitaire a sa valeur. Elle ne coule pas dans un moule, elle vous laisse votre pleine originalité ». Il pensait que cette façon d'apprendre par soi-même permettait de garder l'esprit libre et d'être plus créatif.
Alors qu’il commence à écrire des poèmes dès le début de sa carrière vers 1842, il faudra attendre 1890 pour qu’il écrive sa première chanson. En effet, après s’être essayé aux poésies dès l’âge de 20 ans, il commence à mettre des poèmes en musique seulement à l’âge de 67 ans. C’est peut-être Marius GUIGUES, son second jardinier qui était aveugle mais bon musicien, ou simplement le fait d’être devenu grand-père, qui lui donna l’envie d’apprendre la musique et de composer des chansons.
Ainsi, J-H. FABRE donna à ses enfants une éducation complète avec un enseignement régulier du solfège. Pauline et Anna jouaient du piano et de l’harmonium, Aglaé chantait en s’accompagnant au piano et en toutes saisons on faisait de la musique à l’Harmas à Sérignan.
Hypothèse : J-H.FABRE était ami avec le zoologiste-naturaliste, félibre et musicien, Alfred MOQUIN-TANDON qui lui a d'ailleurs donné l'envie d'étudier la botanique et les insectes, avec une influence déterminante sur sa carrière. Or en 1852, A.MOQUIN-TANDON compose un noël sous forme de la chanson intitulée "La catarineto / La coccinelle" sous le pseudonyme de Fredol de Magalouna. C'est en 1853 que les deux hommes se rencontrent en Corse, pour la première fois. Donc on peut sûrement affirmer que ce serait A.MOQUIN-TANDON qui ait aussi donné l'envie à J-H.FABRE de se mettre à la musique et en l'occurence à la composition de chansons sur les insectes, en provençal... !
* Ses chansons :
À la fin de sa vie, entre 1890 et 1908, J-H. FABRE composa des comptines pour enfants, des rondes (musiques instrumentales à danser), des cantilènes, des chansons et des noëls. La majorité de ses chansons rendent hommage à ses petits amis les insectes ou à des animaux qu’il apprécie particulièrement mais également aux vieux métiers, à des lieux symboliques puis quelques chansons religieuses. On en trouve une vingtaine en langue provençale et une dizaine en français.
« La poésie est partout, même dans le terrier d’un scorpion. » écrit-il à Frédéric MISTRAL en 1906. Il pensait sûrement la même chose de la musique. Car pour J-H. FABRE, chaque bruit, chaque cri est musique. Tout est dit dans ses œuvres littéraires.
Les poésies provençales de J-H. FABRE sont publiées par ROUMANILLE en 1909 sous le titre : Oubreto prouvençalo. En 1925 parait chez DELAGRAVE le recueil : Poésies françaises et provençales. Ce dernier ouvrage est à nouveau publié aux éditions provençales C.P.M. en 1980 avec les partitions des chansons.
* Ses instruments de musique :
Avec les revenus de ses droits d’auteur et les nombreux prix qu’on lui a attribués, J-H. FABRE et sa famille vivaient correctement. Cette situation confortable lui a permis de s’acheter un piano et un harmonium à 5 octaves et 2 pédales ramené de Paris et placé dans un coin de sa salle à manger. |
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* Analyse de sa musique :
Le 8 janvier 1890, J-H.FABRE écrit une lettre à son ami Louis CHARASSE (Majoral du Félibrige) : « Je vous envoie un morceau de ma musique barbare : Lou Lusert. Ne vous laissez pas effrayer par le nombre de bémols. Ceci n’est pas plus difficile que tout autre morceau. Je me suis aperçu que sur l’harmonium les notes altérées par dièse ou par bémol sont beaucoup plus douces que les notes naturelles. Aussi je fais volontiers usage de ces gammes à rébarbative armure. (...) Veillez toutefois au traquenard de la note Ut (bémol) dans le morceau actuel : ce Ut est en réalité un Si naturel. »
Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire que les textes des chansons de J-H. FABRE sont de magnifiques poésies mais concernant la musique, on peut affirmer que son écriture est assez "tordue", sans logique rythmique ni harmonique et ses mélodies sont souvent difficiles à chanter…
Voici quelques caractéristiques musicales de l'écriture de J-H. FABRE :
- Il n’y a pas vraiment de carrure ni de logique harmonique à part la cadence finale et une vague notion de tonalité générale.
- Il utilise très souvent des onomatopées (correspondant aux bruits des insectes, cris d'animaux, bruit du moulin). Musicalement, ces onomatopées sont souvent adaptées musicalement sous forme de trille et de notes répétées.
- Dans ses paroles, il emploie souvent "Mai que mai". Le second "mai" est toujours plus aigu que le premier comme pour amplifier le sens du texte.
- Quand des phrases du texte se répètent (deux ou trois fois), il préfère souvent ne pas répéter la mélodie, elle change alors que les paroles se répètent.
- On peut noter également qu'il aimait très souvent varier les tonalités dans ses premières compositions (et particulièrement celles qui sont très altérées : Si Majeur, Sol bémol Majeur, Do # mineur) ; un peu moins par la suite…
- Enfin rythmiquement, c'est souvent "tortueux" et donc difficile à chanter. On trouve beaucoup de syncopes, ce qui est assez bancal ; mais par contre, du coup, les accents toniques de la langue provençale sont très souvent bien respectés car le rythme suit le texte.
- NB : Les chansons les plus accessibles, avec de jolies mélodies et des harmonies assez logiques sont : "À moun chin Bull", "La libellule", "Nene som som" et "La cigalo". Ensuite on peut également arriver à travailler "Lou lusert", "Lou grapaud", "Lou grihoun", "La cardelino", "Cacalausoun", "Lou tavan" et "Lou moulin". Ses autres chansons sont plus "difficiles d'accès".
Mais qu’importe les fautes d’école, cela montre un désir d’essayer, de créer un art original, de pratiquer une passion supplémentaire.

* Un vocabulaire littéraire précis grâce à la musique :
J-H. FABRE s’est intéressé au rapport entre l’homme et la nature, mais aussi à l’harmonie des formes, à l’harmonie des couleurs et à l’harmonie des sons. Avoir appris la musique lui a permis de comprendre l’harmonie des sons et l’a sans doute aidé à l’analyse de ceux de la nature. Dans ses descriptions d’insectes ou d’animaux, il utilise donc un vocabulaire musical spécialisé parfaitement adapté.
Il écrit par exemple : "Parmi les chanteurs des crépuscules de juillet, un seul, s'il avait note variée, pourrait rivaliser avec les clochettes harmoniques du Crapaud. C'est le Scops ou petit-duc, gracieux rapace nocturne, aux yeux ronds dorés. Il dresse sur le front deux cornicules de plumes qui lui ont valu dans le pays le nom de Machoto banarudo, chouette cornue. Son chant, assez nourri pour remplir à lui seul le silence des nuits, est d'une monotonie énervante. Avec une imperturbable régularité de mesure ; tchô... tchô... fait l'oiseau quand il expectore, des heures durant, sa cantate à la lune. (...)
Chacun a sa note, toujours la même, plus grave pour les uns, plus aiguë pour les autres, note brève, nette, remplissant bien l'oreille et d'une exquise pureté.
D'un rythme lent, cadencé, ils semblent psalmodier des litanies. Cluck, fait celui-ci ; click, répond cet autre à gosier plus fin ; clock, ajoute ce troisième, ténor de la bande. Et cela se répète indéfiniment, comme le carillon du village en un jour férié : cluck, click, clock ; — cluck, click, clock. (...)
Tels seraient donc, en se bornant aux sujets d'élite, les principaux choristes de cette soirée musicale : le Scops, aux langoureux solos ; le Crapaud, carillonneur de sonates ; le Grillon d'Italie, qui racle sur la chanterelle d'un violon ; la Sauterelle verte, qui semble taper sur un minuscule triangle d'acier."
L’entomologiste a passé sa vie à observer, à étudier les insectes. Et un en particulier : c’est en grand spécialiste de musicologie qu’il décrit l’instrument de musique dont est affublé la cigale, celle qu’il peut entendre sur les pins de l’Harmas : « Sous la poitrine du mâle, immédiatement en arrière des pattes postérieures, sont deux amples plaques semi-circulaires, chevauchant un peu l'une sur l'autre, celle de droite sur celle de gauche. Ce sont les volets, les couvercles, les étouffoirs, enfin les opercules du bruyant appareil. Soulevons-les. Alors s'ouvrent, l'une à droite, l'autre à gauche, deux spacieuses cavités connues en Provence sous le nom de chapelle (li capello). Leur ensemble forme l'église (la glèiso). Elles sont limitées en avant par une membrane d'un jaune crème, fine et molle ; en arrière par une pellicule aride, irisée ainsi qu'une bulle de savon et dénommée miroir en provençal (mirau). L'église, les miroirs, les couvercles sont vulgairement considérés comme les organes producteurs du son. D'un chanteur qui manque de souffle, on dit qu'il a les miroirs crevés (a li mirau creba). Le langage imagé le dit aussi du poète sans inspiration. L'acoustique dément la croyance populaire. On peut crever les miroirs, enlever les opercules d'un coup de ciseaux, dilacérer la membrane jaune antérieure, et ces mutilations n'abolissent pas le chant de la Cigale ; elles l'altèrent simplement, l'affaiblissent un peu. Les chapelles sont des appareils de résonance. Elles ne produisent pas le son, elles le renforcent par les vibrations de leurs membranes d'avant et d'arrière ; elles le modifient par leurs volets plus ou moins entr'ouverts.
Le véritable organe sonore est ailleurs et assez difficile à trouver pour un novice. Sur le flanc externe de l'une et de l'autre chapelle, à l'arête de jonction du ventre et du dos, bâille une boutonnière délimitée par des parois cornées et masquée par l'opercule rabattu. Donnons-lui le nom de fenêtre. Cette ouverture donne accès dans une cavité ou chambre sonore plus profonde que la chapelle voisine, mais d'ampleur bien moindre. Immédiatement en arrière du point d'attache des ailes postérieures se voit une légère protubérance, à peu près ovalaire, qui, par sa coloration d'un noir mat, se distingue des téguments voisins, à duvet argenté. Cette protubérance est la paroi extérieure de la chambre sonore. Pratiquons-y une large brèche. Alors apparaît à découvert l'appareil producteur du son, la cymbale. C'est une petite membrane aride, blanche, de forme ovalaire, convexe au dehors, parcourue d'un bout à l'autre de son grand diamètre par un faisceau de trois ou quatre nervures brunes, qui lui donnent du ressort, et fixée en tout son pourtour dans un encadrement rigide. Imaginons que cette écaille bombée se déforme, tiraillée à l'intérieur, se déprime un peu, puis rapidement revienne à sa convexité première par le fait de ses élastiques nervures. Un cliquetis résultera de ce va-et-vient.
Si le temps est calme, chaud, vers l'heure méridienne, le chant de la Cigale se subdivise en strophes de la durée de quelques secondes, et séparées par de courts silences. La strophe brusquement débute… puis faiblit par degrés et dégénère en un frémissement qui décroît à mesure que le ventre revient au repos. Puis soudain, nouvelle strophe, répétition monotone de la première. Ainsi de suite indéfiniment. Il arrive parfois, surtout aux heures des soirées lourdes, que l'insecte, enivré de soleil, abrège les silences, et les supprime même. Le chant est alors continu, mais, toujours avec alternance de crescendo et de decrescendo. C'est vers les sept ou huit heures du matin que se donnent les premiers coups d'archet, et l'orchestre ne cesse qu'aux lueurs mourantes du crépuscule, vers les huit heures du soir. Total, le tour complet du cadran pour la durée du concert. »
Pareillement, J-H. FABRE a décrit l’appareil sonore du grillon qui prend le relais de la cigale à la nuit tombante.
Il écrit à propos du grillon champêtre : "Avril finit, et le chant commence, rare d'abord et par solos discrets, bientôt symphonie générale où chaque motte de gazon a son exécutant. Je mettrais volontiers le Grillon en tête des choristes du renouveau. Dans nos garrigues, lors des fêtes du thym et de la lavande en fleur, il a pour associée l'Alouette huppée, fusée lyrique qui monte, le gosier gonflé de notes, et de là-haut, invisible dans les nuées, verse sur les guérets sa douce cantilène. D'en bas lui répond la mélopée des Grillons. C'est monotone, dépourvu d'art, mais combien conforme, par sa naïveté, à la rustique allégresse des choses renouvelées ! C'est l'hosanna de l'éveil, le saint alléluia compris du grain qui germe et de l'herbe qui pousse. En ce duo, à qui la palme ? Je la donnerais au Grillon. Il domine par son nombre et sa note continue. L'Alouette se tairait, que les champs glauques des lavandes, balançant au soleil leurs encensoirs camphrés, recevraient de lui seul, la modeste, solennelle célébration.
Voici que l'anatomie intervient et dit brutalement au Grillon : "Montre-nous ton engin à musique." - Il est très simple, comme toute chose de réelle valeur ; il est basé sur les mêmes principes que celui des locustiens : archet à crémaillère et pellicule vibrante.
L'élytre droite chevauche sur l'élytre gauche et la recouvre presque entière, moins le brusque repli qui emboîte le flanc. C'est l'inverse de ce que nous montrent la Sauterelle verte, le Dectique, l'Ephippigère et leurs apparentés. Le Grillon est droitier, les autres sont gauchers. (...)
Bel instrument en vérité, bien supérieur à celui du Dectique. Les cent cinquante prismes de l'archet mordant sur les échelons de l'élytre opposé ébranlent à la fois les quatre tympanons, ceux d'en bas par la friction directe, ceux d'en haut par la trépidation de l'outil frictionneur. Aussi quelle puissance de son ! Le Dectique, doué d'un seul et mesquin miroir, s'entend tout juste à quelques pas ; le Grillon, possesseur de quatre aires vibrantes, lance à des cent mètres son couplet.
Il rivalise d'éclat avec la Cigale, sans en avoir la déplaisante raucité. Mieux encore : le privilégié connaît la sourdine d'expression. Les élytres disons-nous, se prolongent chacun sur le flanc en un large rebord. Voilà les étouffoirs qui, plus ou moins rabattus, modifient l'intensité sonore et permettent, suivant l'étendue de leur contact avec les mollesses du ventre, tantôt chant à mi-voix et tantôt chant dans sa plénitude.
La paix règne dans la chambrée tant que n'éclate pas l'instinct batailleur de la parade (...)
On dit que les Grecs, passionnés de musique, élevaient des Cigales en cage pour mieux jouir de leur chant. Je me permets de ne pas en croire un mot. D'abord l'aigre cliquetis des Cigales, longtemps prolongé dans un étroit voisinage, est un supplice pour une oreille quelque peu délicate. Les Grecs avaient l'ouïe trop bien disciplinée pour se complaire à de telles raucités en dehors du concert général des champs, entendu à distance. En second lieu, il est absolument impossible d'élever en captivité des Cigales, à moins de mettre sous cloche un olivier, un platane, ce qui fournirait une volière d'installation peu commode sur le rebord d'une fenêtre. Pour une journée de séjour dans une enceinte peu spacieuse, l'insecte aux grands essors se laisse mourir d'ennui. N'aurait-on pas confondu le Grillon avec la Cigale, comme on le fait aussi de la Sauterelle verte ? Le Grillon, à la bonne heure. (...)
L'un d'eux, quoique inférieur de taille et non moins parcimonieusement outillé, dépasse, et de beaucoup, la Sauterelle en lyrisme nocturne. C'est le pâle et fluet Grillon d'Italie (OEcanthus pellucens Scop.), si débile qu'on n'ose le saisir crainte de l'écraser. Il concerte de tous côtés sur les romarins, tandis que les vers luisants allument, pour compléter la fête, les feux bleus de leurs lampions.
Le délicat instrumentiste consiste avant tout en vastes ailes, fines et miroitantes, ainsi que des lamelles de mica. A la faveur de cette aride voilure, il stridule avec une intensité capable de dominer la cantilène des Crapauds. On dirait, mais avec plus d'éclat, plus de tremolo dans le coup d'archet, le chant du vulgaire Grillon noir. La confusion est inévitable pour qui ne sait pas qu'à cette époque des fortes chaleurs le vrai Grillon, orphéoniste du printemps, a disparu..."
Et à propos de la sauterelle : "La nuit, dans le fouillis de verdure, une oreille fine perçoit le susurrement des Sauterelles. C'est une sorte de bruit de rouet, très discret, vague frôlement de pellicules arides froissées. Sur cette sourde basse continue éclate, par intervalles, un cliquetis précipité, très aigu, presque métallique. Voilà le chant et la strophe entrecoupée de silences. Le reste est l'accompagnement.
Malgré ce renfort d'une basse, maigre, très maigre concert après tout, bien qu'il y ait dans mon étroit voisinage une dizaine environ d'exécutants. Le son manque d'intensité."
Et à propos du crapaud : "L'orphéon batracien me remet en mémoire certain harmonica, ma convoitise lorsque, pour mon oreille de six ans, commençait à devenir sensible la magie des sons. C'était une série de lames de verre d'inégale longueur, fixées sur deux rubans tendus. Un bouchon de liège au bout d'un fil de fer servait de percuteur. Imaginez une main novice frappant au hasard sur ce clavier, avec la brusquerie la plus désordonnée d'octaves, de dissonances, d'accords renversés, et vous aurez une image assez nette de la litanie des Crapauds.
Comme chant, cette litanie n'a ni queue ni tête ; comme sons purs, c'est délicieux. Il en est ainsi de toute musique dans les concerts de la nature. Notre oreille y trouve de superbes sons, puis s'affine et acquiert, en dehors des réalités sonores, le sentiment de l'ordre, première condition du beau.
Or cette douce sonnerie d'une cachette à l'autre est l'oratorio matrimonial, la convocation discrète de chacun à sa chacune. Les suites du concert sans autre informé se devinent ; mais ce qu'il serait impossible de prévoir, c'est l'étrange finale des noces."
J-H. FABRE parle en connaisseur. Ainsi, son vocabulaire est toujours très précis, même en poésie ! Il peut tout aussi bien parler de l’appareil sonore que de l’origine des instruments de musique. Mais si la nature a de merveilleux sons, a-t-elle une musique ? J-H. FABRE n’en est pas convaincu : « Hurler, braire, grogner, hennir, beugler, bêler, glapir, là se borne la phonétique de nos proches voisins en organisation. Composée de ces éléments, une partition s’appellerait charivari. Par une exception frappante, l’homme au sommet de la série de ces gosiers bruyants, s’avisa de chanter. Un attribut que nul ne partage avec lui, l’attribut des sons coordonnés d’où dérive l’incomparable don de la parole, l’incita aux correctes vocalises. Le modèle manquant, l’apprentissage dut être laborieux. »
J-H. FABRE aimait la musique et le spectacle de la nature. Lui même poète et musicien, il nous a laissé la preuve de son attachement au monde des artistes. Lorsqu’il réécrit la Fable de la Cigale et la Fourmi, il rétablit la vérité scientifique, n’en déplaise à Jean de la Fontaine, légèrement égratigné au passage. Mais notre savant universel en profite aussi pour prendre la défense de ceux qui, comme la cigale, font de leur existence une œuvre d’art.
* De la musique jusqu’à la fin de sa vie :
En 1911, le poète Jean RICHEPIN accompagné d’une délégation d’académiciens et de nombreuses autres personnalités rendent visite à J-H. FABRE qui les attend assis à la terrasse, entouré par les siens. Les filles de J-H. FABRE annoncent à leur père, à mesure qu’ils se présentent, les noms des visiteurs de marque. Son visage montrait l’étonnement, presque l’inquiétude, en présence d’une telle foule.
À l’heure du départ, J-H. FABRE, malgré sa faiblesse, voulut raccompagner son monde jusqu’à la grille. Jean RICHEPIN le soutint. Un jeune homme aida à faire suivre le fauteuil tant J-H. FABRE doit interrompre sa marche afin de se reposer. Tout le monde suivait avec recueillement. Puis RICHEPIN demande à une chanteuse d’interpréter la chanson de Magali en guise d’adieu. Dans un sursaut d’énergie, J-H. FABRE proteste avec force : « Non jamais ! » Car fidèle à sa loi félibréenne, « lou felibre di tavan » ne veut pas entendre l’air de l’opéra-comique de Charles GOUNOD, qui est pour lui une profanation. Mais sa femme lui précise qu’il s’agit de la vraie Magali provençale, celle de Frédéric MISTRAL : « Ah ! Oui, alors je veux bien », répond le savant. La chanteuse commence la mélodie et bientôt les larmes ruissellent sur le visage du félibre. On a écrit que toute sa jeunesse reparaissait dans ses yeux visionnaires ; tous pleuraient. Les témoins ne devaient jamais oublier le geste puéril et sacré que le vieil homme esquissa pour applaudir, tout en murmurant : « Ça fait encore pleurer… ».
Cette année là, le Prix Nobel de littérature sera refusé à J-H. FABRE pour la seconde fois. L’année suivante, en 1912, sa femme Marie-Joséphine meurt d’un cancer. En 1913, c’est le Président de la République, Raymond POINCARÉ, qui vient en personne lui rendre visite à l’Harmas. J-H. FABRE ne manifesta aucune joie. Il était usé par la vie. Il s’éteindra en 1915 à l’âge de 92 ans.
On gardera de Jean-Henri FABRE, l’image d’un très grand savant, véritable passeur de science, mais surtout d’un homme réceptif en tous domaines contribuant à enrichir l’esprit, tant dans le domaine des sciences que dans le domaine des arts. Avec Edmond ROSTAND, redisons que « J-H. FABRE enferme sa vie dans son œuvre. Ce grand savant pense en philosophe, voit en artiste (musicien), sent et s’exprime en poète ».

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I) Chansons en provençal :
Toutes ces chansons ont été réunies et publiées dans le recueil "Oubreto prouvençalo" en 1908 :
"Pàuris Oubreto, ùmbli bachiquello, jamai de la vido de mi jour la pensado m'èro vengudo de vous rambaia en un librihoun flame-nòu !
A l'ouro d'uei, lou devès, aquel ounour, à moun fraire, Frédéric Fabre, e à mi dous nebout, Antonin e Henri,
que n'an pas vougu vous leissa peri dins li vièi papié dóu Felibre di Tavan, ounte adeja lou ralun niso.
A tóuti li tres, faguen dounc amistadouso capelado."
J.-H. FABRE,
Serignan (Vau-Cluso), 4 d'óutobre 1908.
- À moun chin Bull / À mon chien Bull :

Paroles et musique de Jean-Henri FABRE. Écrites en juillet 1890.
Publiées pour la première fois dans l'Armana Prouvençau de 1891.
NB : On peut remarquer que le début de la mélodie ressemble au début de la chanson traditionnelle "Lou gau e lou canebe".
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN. 
Version originelle :
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Traduction en français
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COUBLET 1 :
Moun paure Bull, la mousco te tracasso,
As de niero toun plen péu rous,
E tout lou jour, pèr ié douna la casso,
T'escrimes coum' un malurous.
REFRIN :
Ardit moun Bull, moun brave chin,
Casso la mousco, casso la mousco.
Ardit moun Bull, moun brave chin,
De niero e de mousco, agues la fin.
COUBLET 2 :
Au souleias, estèndes ta ventresco,
E t'espóusses lis aurihoun,
Espinches... Hau ! ... Agantes coume lesco,
Au vòu, l'insoulènt mousquihoun.
Au REFRIN
COUBLET N°3:
Toun nas lusènt, negre coume la
pego,
Niflo dins ta bourro de chin,
Furo la niero e tout ço que boulego,
Dins li ple de toun casaquin.
Au REFRIN
COUBLET N°4 :
E se mau-grat ti dènt, ti cop de
narro,
La pesoulino poun au viéu,
Emé l'arpioun, jogues de la guitarro,
Asseta 'n travès sus lou quiéu.
Au REFRIN |
COUPLET 1 :
Mon pauvre Bull, la mouche te tracasse,
Tu as des puces plein ton poil roux,
Et tout le jour, pour leur donner la chasse,
Tu t'escrimes comme un malheureux.
REFRAIN :
Hardis mon Bull, mon brave chien,
Chasse la mouche, chasse la mouche.
Hardis mon Bull, mon brave chien,
De puces et de mouches, tu en as la fin.
COUBLET N°2 :
Au soleil, tu entends ta bedaine,
Et tu te secoues les oreilles,
Tu épies... Hou ! Tu attrapes comme lèche, (appât de chasse)
Au vol, l’insolent moustique.
Au REFRAIN
COUPLET N°3 :
Ton nez luisant, noir comme la colle,
Renifle dans ta chevelure (ton pelage) de chien,
Cherche les puces et tout ce qui bouge,
Dans les plis de ton casaquin.
Au REFRAIN
COUPLET N°4 :
Et si malgré tes dents, tes coups de museau
Les poux te piquent au vif,
Avec ta griffe, tu joues de la guitare,
Assis en travers sur le cul (le derrière).
Au REFRAIN |
NB : Dans la deuxième phrase du premier couplet, il y a un accent tonique mal placé par rapport au rythme de la musique (le "o" muet de "niero" qui tombe sur le premier temps fort de la mesure) ; mais on peut résoudre le problème en remplaçant par : "De niero as plen toun péu rous".

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- Bautezar / Balthazar : (1897)

Présentation : Noël écrit, en provençal, à Sérignan "trois semaines avant Noël" de 1897.
Autres titres possibles : "Bautasar", "Clar de luno pèr Calèndo".
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en décembre 1897. Paroles publiées dans l'Armana Prouvençau de 1899 ; et musique dans "Poésies françaises et provençales" (Ed. Delagrave, 1925).
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
Bautasar (Clar de luno pèr Calèndo) |
Bautezar |
Traduction en français
: Balthazar (Clair de lune pour Noël) |
I)
Darrié li nivo de coutoun,
La luno jogo is escoundaio ;
D'un rode à l'autre dóu mouloun,
S'ennegresis e pièi dardaio ;
Espincho, curiouso, eiçabas. Pèr lou sòu,
La blanco bugadiero espandis si linçòu,
Si grand linçòu de lum qu'en silènci va courre
Sus la tepo di plano e la roco di mourre.
Quand a passa sus lis oustau,
Subran l'eiminado de tèlo
Di téulisso escalo au coutau
E de soun trelus l'enmantello.
Alor, esgarussi d'éuse e de petelin,
Lou mourre tranquilas blanquinejo eilalin
E, soulemne, retrais souto sa capelino
Lou mage Bautasar, mitra de mousselino.
Es éu, parai ? — Segur es éu,
Adès vengu dóu founs dis Indo.
Vaqui sa chourmo de camèu.
En liogo de sounaio, dindo
A si còu loungaru, lou bouissoun d'argelas
Brandussa pèr lou vènt ; mai lou bestiàri las
S'es coucha d'à-geinoun, l'esquinasso gibouso,
Lou vèntre plen d'aglan, de bauco, de darbouso.
Li camelié à blanc burnous
Se soun plega dins si mantiho ;
Clinon lou front e dourmihous
Penequejon sus li lausiho.
Bridèu d'or e de sedo, estrié bèn fignoula,
Coulas de nacre, an tout i bouissoun pendoula ;
Dins un fum de bebèi que tremolo e flouquejo,
En rampau glourious lou cade beluguejo.
Au clar de luno, adounc veici
Qu'entre lis avaus dis auturo,
En roudelet, d'eila, d'eici,
Dormon li gènt e si mounturo.
Bautasar, éu, dor pas ; nàni : li bras crousa,
Un turban de roumese autour dóu front nousa,
Viho, e quand dóu marin lis alenado passon,
Reluco pèr li trau di nivo que s'estrasson.
II)
Tu qu'as tant barrula pèr mar e pèr camin,
O lou mai saberu di mage !
Tu qu'as legi de tout dins li vièi pergamin,
Testimòni vengu di sage ;
Tu qu'entèndes l'ibis, l'escaravai sacra
Dis oubelisco egypciano ;
Tu que grates dóu det e sabes deschifra
Li letro de la brico anciano,
Ounte lou Caldeen, embarba de frisoun,
Au four couisié soun escrituro
En formo de clavèu, pèr dire li sesoun,
Li mes e li jour de culturo ;
Tu, lou meravihous prince di camelié,
Qu'as tant de fes emé li pastre
Escala de Babel li sèt milo escalié
Pèr estudia la niue lis astre ;
Tu qu'au lindau di rèi as souvènt escouta
Lou secrèt di biòu de Ninivo,
Di grand biòu oumenas, dous pèr dous acouta,
Que veses pèr li trau dóu nivo ?
III)
Ausès e cresès-lou, car n'a jamai menti.
Lou gigant d'eilamount, tout apensamenti,
Nous saludo à la modo antico ;
E lou roucas brusis de "hi-hi !" de "hou-houp !"
De-qu'es ? Lou chafaret de l'aurasso e di loup ? —
Noun, es Bautasar que replico
E nous dis : En ivèr, tèms passa, pèr li trau
D'un nivo espetaclous cousseja dóu mistrau,
Ai vist parpeleja l'estello
Esbrihaudanto que, dóu levant au pounènt,
Mountavo e nous venié, dins soun càrri d'argènt,
Adurre la bono nouvello.
La suiviguère emé mi gènt e mi camèu
Tres mes. Pièi s'arrestè sus lou marrit amèu
De Betelèn, en Palestino.
Aqui, l'ase paciènt e lou biòu pietadous
Tubavon de la narro, à geinoun tóuti dous
Au founs d'uno jasso mesquino.
E clin, en grand respèt, caufavon de l'alen,
Dins lou brès d'uno grùpio e sus un pau de fen,
Un enfantoun na de la vèio.
M'ensouvène : jalavo en l'èr ; mai l'enfantoun
A la caud em'un bon lagne en pèu de móutoun,
Risié dins la tousco tubèio.
Ço qu'èro, acò se saup. Èro lou Rèi di rèi,
Lou suprème soulas, lou gouvèr e la lèi
De tout noble cor. En memòri
De la visito, iéu, Gaspar e Melchior
Avèn pourgi l'encèns emé la myrrho e l'or
Dins un coufret ciéucla d'ivòri.
De la fe dis ancian, aro que n'avès fa,
Maufatan ? Lou prougrès, anas dire, a boufa
Sus l'anticaio desmoudado.
Ah ! lou requist prougrès ! Avès sus lou mantèu
Dóu Paire eterne, grand manescau di soulèu,
Escupi vosto verinado.
Avès tout ensali. La forço fai lou dre ;
Lou rascas dèu prima lou juste que vai dre
Dins lou tiro-péu de la vido ;
Lou mounde d'eilamount es un conte de niai ;
Sian bestiàri e creban coume li porc, lis ai ;
Gènt e chin an meme finido.
E tout es di de l'ome alor que, pèr toujour,
Tres palado de terro, em'un brut de tambour,
An esquiha sus l'embourigo.
Car l'amo, qu'es, dirés ? Es rèn, un mot, pas mai.
Sus l'aigo de saboun ansin peto e s'envai
Lou bèu trelus de la boufigo.
O grapaud de palun, de fango enmoustesi,
Tèsto-d'ase savènt, envisca de mousi,
Nous audusès fièro dóutrino !
Erian na de l'argelo, entre li man de Diéu.
Avès trouva bèn mies, e sian li noble fiéu,
Dóu Gouriho e de la Mounino !!
Maufatan de malur ! Que sara l'aveni !
Dins li trau founs di nivo aro vese veni
La negro e fèro malamagno ;
Ah ! vese... Mai la luno alor s'escoundeguè
E dins lou tenebrun subran s'esvaniguè
Lou blanc Bautasar di mountagno. |
I)
Darrié li nivo de coutoun,
La luno jogo is escoundaio ;
D'un rode à l'autre dóu mouloun,
S'ennegresis e pièi dardaio ;
Espincho, curiouso, eiçabas. Pèr lou sòu,
La blanco bugadiero espandis si linçòu,
Si grand linçòu de lum qu'en silènci va courre
Sus la tepo di plano e la roco di mourre.
Quand a passa sus lis oustau,
Subran l'eiminado de tèlo
Di téulisso escalo au coutau
E de soun trelus l'enmantello.
Alor, esgarussi d'éuse e de petelin,
Lou mourre tranquilas blanquinejo eilalin
E, soulenne, retrais souto sa capelino
Lou mage Bautezar, mitra de mousselino.
Es éu, parai ? — Segur es éu,
Adès vengu dóu founs dis Indo.
Vaqui sa chourmo de camèu.
En liogo de sounaio, dindo
À si còu loungaru, lou bouissoun d'argelas
Brandussa pèr lou vènt ; mai lou bestiàri las
S'es coucha d'à-geinoun, l'esquinasso gibouso,
Lou vèntre plen d'aglan, de bauco, de darbouso.
Li camelié à blanc burnous
Se soun plega dins si mantiho ;
Clinon lou front e dourmihous
Penequejon sus li lausiho.
Bridèu de sedo e d'or, coulas escrincela,
Estrié de nacre, an tout i bouissoun pendoula ;
Dins un fum de bebèi que tremolo e flouquejo,
En rampau glourious lou cade beluguejo.
Au clar de luno, adounc veici
Qu'entre lis avaus dis auturo,
En roudelet, d'eila, d'eici,
Dormon li gènt e si mounturo.
Bautezar, éu, dor pas ; nàni : li bras crousa,
Un turban de roumese autour dóu front nousa,
Viho, e quand dóu marin lis alenado passon,
Reluco pèr li trau di nivo que s'estrasson.
II)
Tu qu'as tant barrula pèr mar e pèr camin,
O lou mai saberu di mage !
Tu qu'as legi de tout dins li vièi pergamin,
Testimòni vengu di sage ;
Tu qu'entèndes l'ibis, l'escaravai sacra
Dis oubelisco egypciano ;
Tu que grates dóu det e sabes deschifra
Li letro de la brico anciano,
Ounte lou Caldeen, embarba de frisoun,
Au four couisié soun escrituro
En formo de clavèu, pèr dire li sesoun,
Li mes e li jour de culturo ;
Tu, lou meravihous prince di camelié,
Qu'as tant de fes emé li pastre
Escala de Babèl li sèt milo escalié
Pèr estudia, la niue, lis astre ;
Tu qu'au lindau di rèi, as souvènt escouta
Lou secrèt di biòu de Ninivo,
Di grand biòu oumenas, dous pèr dous acouta.
Que veses, pèr li trau di nivo ?
III)
Ausès e cresès-lou, car n'a jamai menti.
Lou gigant d'eilamount, tout apensamenti,
"Nous salue à la façon antique ;"
E lou roucas brusis de "hi-hi !" de "hou-hou !"
De-qu'es ? Lou chafaret de l'aurasso e di loup ?
Noun, es Bautezar que replico
E nous dis : "En ivèr, tèms passa, pèr li trau
D'un nivo espetaclous cousseja dóu mistrau,
Ai vist parpeleja l'estello
Esbrihaudanto que, dóu levant au pounènt,
Mountavo e nous venié, dins soun càrri d'argènt,
Adurre la bono nouvello.
La seguiguère emé mi gènt e mi camèu
Tres mes. Pièi s'arrestè sus lou marrit amèu
De Betelèn, en Palestino.
Aqui, l'ase paciènt e lou biòu pietadous
Tubavon de la narro, à geinoun tóuti dous
Au founs d'uno jasso mesquino.
E clin, en grand respèt, caufavon de l'alen,
Dins lou brès d'uno grùpio e sus un pau de fen,
Un enfantoun na de la vèio.
M'ensouvène : jalavo en l'èr ; mai l'enfantoun
À la caud em'un bon lagne en pèu de móutoun,
Risié dins la tousco tubèio.
Ço qu'èro, acò se saup. Èro lou rèi di rèi,
Lou suprème soulas, lou gouvèr e la lèi
De tout noble cor. En memòri
De la visito, iéu, Gaspar e Melchior
Avèn pourgi l'encèns emé la mirro e l'or
Dins tres coufret ciéucla d'ivòri.
De la fe dis ancian, aro que n'avès fa,
Maufatan ? Lou prougrès, anas dire, a boufa
Sus l'anticaio desmoudado.
Ah ! Lou requist prougrès ! Avès sus lou mantèu
Dóu paire eterne, grand manescau di soulèu,
Escupi vosto verinado.
Avès tout ensali. La forço fai lou dre ;
Lou rascas dèu prima lou juste que vai dre
Dins lou tiro-péu de la vido ;
Lou mounde d'eilamount es un conte de niai ;
Sian bestiàri e creban coume li miòu, lis ai ;
Gènt e chin an memo finido.
E tout es di de l'ome alor que, pèr toujour,
Tres palado de terro, em'un brut de tambour,
An esquiha sus l'embourigo.
Car l'amo, qu'es, disès ? Es rèn, un mot, pas mai.
Sus l'aigo de saboun ansin peto e s'envai
Lou bèu trelus de la boufigo.
O grapaud de palun, de fango enmoustousi,
Tèsto-d'ase savènt, envisca de mousi,
Nous audusès fièro dóutrino !
Erian na de l'argielo, entre li man de Diéu.
Avès trouba bèn miés, e sian li nòbli fiéu,
Dóu gouriho e de la mounino !!
Maufatan de malur ! Que sara l'aveni !
Dins li trau founs di nivo aro vese veni
La negro e fèro malamagno ;
Ah ! vese ... "Mai la luno alor s'escoundeguè
E dins lou tenebrun subran s'esvaniguè
Lou blanc Bautezar di mountagno. |
I)
Derrière les nuages de coton,
La lune joue à cache-cache ;
D'un point à l'autre de l'amas,
Elle s'obscurcit et puis rayonne ;
Curieuse, elle regarde ici-bas. Sur le sol,
La blanche lavandière étale ses draps,
Ses grands draps de lueur qui, en silence, vont courir
Sur la pelouse des plaines et des rochers des collines.
Quand elle a passé sur les maisons,
Soudain l'éminée de toile
Monte des toits au coteau
Et l'enveloppe de son éclat.
Alors, hérissée d'yeuses et de térébinthes,
La cime paisible blanchit au loin
Et, solennelle, ressemble sous sa capeline
Au mage Balthazar, mitré de mousseline.
C'est lui, n'est-ce-pas ? — Certainement, c'est lui,
Naguère venu du fond des Indes.
Voilà sa troupe de chameaux.
Au lieu de sonnaille, tinte
À leurs cous allongés, le buisson du genêt épineux
Agité par le vent ; mais le bétail fatigué
S'est couché à genoux, l'échine gibbeuse,
Le ventre plein de glands, de gramens et d'arbouses.
Les chameliers à blanc burnous
Se sont enveloppés de leur mantille ;
Ils clignent le front et assoupis
Ils sommeillent sur de petits éclats de pierre.
Brides de soie et d'or, colliers ciselés,
Étriers de nacre, ils ont tout suspendu aux buissons.
Dans une nuée de joyaux tremblotant par flocons,
En glorieuse girandole le genévrier scintille.
Au clair de lune, voici donc
Que parmi les chênes kermès des hauteurs,
Par petits groupes, d'ici, de là,
Dorment les gens et leurs montures.
Balthazar, lui, ne dort pas. Oh ! non. Les bras croisés,
Un turban de ronces noué autour du front,
Il veille ; et lorsque du vent du midi le souffle passe,
Il regarde par les trouées des nuages qui se déchirent.
II)
Toi qui tant as voyagé par mer et par chemins,
Ô le plus savant des mages !
Toi qui as lu de tout dans les vieux parchemins,
Témoignages venus des sages.
Toi qui comprends l'ibis, le scarabée sacré
Des obélisques de l'Égypte ;
Toi qui grattes du doigt et sais déchiffrer
Les lettres de la brique ancienne,
Où le Chaldéen, à barbe frisée,
Faisait cuire au four son écriture,
En forme de clous, pour dire les saisons,
Les mois et les jours de culture ;
Toi, le merveilleux prince des chameliers,
Qui as tant de fois avec les pâtres
Gravi de Babel les sept mille marches
Pour étudier, la nuit, les astres ;
Toi qui, au seuil des rois, as souvent écouté
Le secret des boeufs de Ninive,
Des grands boeufs à tête humaine, deux par deux assemblés,
Que vois-tu par le trou des nuées ?
III)
Écoutez et croyez-le, car il n'a jamais menti.
Le géant de là-haut, tout pensif,
Nous salue à la façon antique ;
Et le rocher bruit de "hi-hi !" de "hou-hou !"
Qu'est-ce ? Le vacarme de la bise et des loups ?
Non, c'est Balthazar qui réplique
Et il nous dit : "En hiver, autrefois, par les trous
D'un nuage extraordinaire chassé par le mistral,
J'ai vu clignoter l'étoile
Éblouissante qui, du levant au couchant,
Montait et venait, dans son char d'argent,
Nous apporter la bonne nouvelle.
Je la suivis avec mes gens et mes chameaux
Trois mois. Puis elle s'arrêta sur le pauvre hameau
De Bethléem en Palestine.
En ce lieu, l'âne patient et le boeuf compatissant
Fumaient de la narine, à genoux tous les deux
Au fond d'une misérable masure.
Et penchés, en grand respect, ils chauffaient de leur haleine
Dans le berceau d'une crèche et sur un peu de foin,
In petit enfant né de la veille.
Je m'en souviens : il gelait en l'air, mais le petit enfant
Au chaud avec un bon lange en peau de mouton,
Riait dans la tiède fumée.
Ce qu'il était, on le sait. C'était le roi des rois,
Le suprême soulagement, la règle et la loi
De tout noble coeur. En mémoire
De la visite, Gaspard, Melchior et moi
Avons offert l'encens avec la myrrhe et l'or
Dans trois coffrets cerclés d'ivoire.
De la foi des anciens, maintenant qu'avez-vous fait,
Malfaiteurs ? Le progrès, allez-vous dire, a soufflé
Sur l'antiquaille démodée.
Ah ! Le beau progrès ! Sur le manteau
Du père éternel, grand forgeron des soleils,
Vous avez craché votre venin.
Vous avez tout souillé. La force fait le droit ;
Le gredin doit primer le juste qui va droit
Dans l'arrache-poil de la vie ;
Le monde de là-haut est un conte de niais ;
Nous sommes bétail et nous crevons comme les mulets, les ânes ;
Gens et chiens ont même fin.
Et tout est dit de l'homme alors que, pour toujours,
Trois pelletées de terre, avec un bruit de tambour,
Ont glissé sur le nombril.
Car l'âme, qu'est-elle, dites-vous ? Elle n'est rien, un mot, pas davantage.
Sur l'eau de savon ainsi claque et disparaît
Le bel éclat de la bulle.
Ô crapauds des marais, embrenés de la fange,
Têtards savants, englués de moisi,
Vous nous apportez fière doctrine !
Nous étions nés de l'argile, entre les mains de Dieu.
Vous avez trouvé bien mieux, et nous sommes les nobles fils
Du gorille et de la guenon !
Odieux malfaiteurs ! Que sera l'avenir !
Dans les trous profonds des nuées maintenant je vois venir
Le noir et sauvage péril ;
Ah ! je vois... "Mais la lune alors se cacha
Et dans l'obscurité soudain s'évanouit
Le blanc Balthazar des montagnes. |

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- Cacalausoun / Petit escargot (07/1890) :
Comptine
Lou cacalausoun |
Traduction en français
: Le petit escargot |
Empega contro lou roucas,
Calcina, rufe, blanquinas,
Cacalausoun dins sa couquiho,
À mita mort, à mita viéu,
Se grasiho, se grasiho
Au souleias de l’estiéu. |
Collé contre le rocher,
Calciné, rugueux, d'un blanc sale,
Petit escargot dans sa coquille,
À moitié mort, à moitié vif,
Se
grille, se grille
Au puissant soleil de l'été. (Bis) |

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- La Cacalauso / L'escargot :
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrites en juillet 1890.
Publié pour la première fois dans l'Armana Prouvençau de 1891.
La Cacalauso |
Traduction en français
: L'escargot |
I)
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu, plòu plou. — La Cacalauso
Banejo dessouto la lauso
E plan-planet sort de soun trau.
Porto pèr gibo soun oustau.
REFRIN :
Emé ti quatre baneto,
Emé ti quatre bastoun,
Ounte vas, cacalauseto,
Pèr cantoun e recantoun ?
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu , plòu, plòu, "Roulo ta bosso.
Bèu cacalaus. Ah ! N’i'a pas foço
De tant urous dins li roucas
Li vèrdi tepo e li baucas !"
Au REFRIN
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu, plòu, plou. — Dins ta couquiho
Lou trelus de la nacro briho.
As palai de bello façoun,
N’en siés lou mèstre, lou massoun.
Au REFRIN
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu plòu, plòu, — Touto souleto
Dins ta superbo cabaneto.
Dormes e fas la digestioun,
Sènso paga countribucioun.
Au REFRIN
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu, plòu, plòu — Se de l’aurasso
Lou brulau boufet te tracasso.
Se fai trop fre, se fai trop caud,
Fermes ta porto e rèstes siau.
Au REFRIN
II)
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu plòu plou. — Pèr tèms de plueio
M’en vau brouta li tèndro fueio
Dourmi, manja manja, dourmi,
Es ma vido, moun bèl ami.
REFRIN :
Emé mi quatro baneto,
Emé mi quatre bastoun,
Vau pauro Cacalauseto,
Pèr cantoun e recantoun.
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu, plòu, plou. — Vau, de ma panso,
Quand lou tron peto e l’uiau danso,
Calma lou ruscle, l’orre mau
Que secuto tout animau.
Au REFRIN
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu plòu plou. — La panso pleno
D’ourtoulaio de touto meno,
Dins moun oustau m’embarrarai
E pièi tout l’ivèr dourmirai.
Au REFRIN
L’uiau lusis,
Lou tron brusis,
E plòu, plòu plou. — Pèr sesoun bono,
Rustiquen dur. Elo nous dono
De que passa li marrit jour.
Vaqui perqué Cacalaus court.
Au REFRIN |
I)
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. L'escargot
Montre ses crones par dessous la pierre plate
Et tranquillement sort de son trou.
Il porte en guise de bosse sa maison.
REFRAIN :
Avec tes quatre petites cornes,
Avec tes quatre bâtons,
Où vas-tu, petit escargot,
Par tous les coins et recoins ?
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. "Roule ta bosse.
Bel escargot. Ah ! Il n’y en a pas beaucoup
De tant heureux dans les rochers
Les verts gazons et les touffes de graminées !"
Au REFRAIN
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. Dans ta coquille,
Le trelus de la nacre brille ; .
Tu as palai de belle façon,
Tu en es le maître, le maçon.
Au REFRAIN
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. Toute seule
Dans ta superbe petite cabanne.
Tu dors et tu fais la digestion,
Sans payer contribution.
Au REFRAIN
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. Si de l’aurasso
Le brulau boufet te tracasse.
S'il fait trop frais, s'il fait trop chaud,
Ferme ta porte et reste siau.
Au REFRAIN
II)
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. Par temps de pluie,
Je m’en vais brouter les tendres feuilles ;
Dormir, manger manger, dormir,
C'est ma vie, mon bel ami.
REFRAIN :
Avec tes quatre petites cornes,
Avec tes quatre bâtons,
Où vas-tu, petit escargot,
Par tous les coins et recoins.
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. Vau, de ma panso,
Quand le tonnerre pète et l’éclair danse,
Calmer le ruscle, l’horrible mal
Qui persécute tout animal.
Au REFRAIN
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. La panse pleine
D’ourtoulaio de toute sorte,
Dans ma maison je m’emfermerai
Et puis tout l’hiver je dormirai.
Au REFRAIN
L’éclair brille,
Le tonnerre gronde,
Et il pleut, il pleut. Par bonne saison,
Nous mastiquons dur. Elle nous donne
De quoi passer les mauvais jours.
Voici pourquoi Escargot court.
Au REFRAIN |

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- La Cigalo / La cigale : (07/1890)

Il existe 16 sortes de cigales...
et l'été elles sont toutes au rendez-vous !
(classées de la plus grosse à la plus petite)
 |
Nom scientifique |
Nom commun |
Lyristes plebejus |
La grande cigale commune, le gros cul |
Cicada orni |
Le cacan, la cigale grise, la cigale panachée |
Cicadatra atra |
La cigale noire |
Tibicina haematodes |
La cigale rouge |
Tibicina tomentosa |
La cigale cotonneuse, la cigale peinte |
Tibicina corsica |
La cigale Corse de Rambur |
Tibicina quadrisignata |
La cigale quadrisignée |
Tibicina nigronervosa |
La cigale aux nervures noires |
Tibicina garricola |
La cigale du garric |
Tibicina fairmairel |
La cigale des cistes de Fairmaire |
Cicadetta montana |
La petite cigale des montagnes |
Cicadetta petryl |
La cigale de Petry |
Cicadetta fangoana |
La cigalette du fango |
Tettigetta argentata |
La cigalette argentée, la cigale-tambour |
Tettigetta pygmea |
La cigale pygmée, la cigale mignonne |
Cicadivetta tibialis |
La cigalette aux tibias armés |
La cigalo |
Traduction en français
: La cigale |
Aro que fai caud,
Ah ! Quto chavano,
Davans moun oustau,
Quand sus li platano
La Cigalo e lou Cacan
Au souleias fan boucan !
Cigaleto, cigaleto,
Fai brusi ti chimbaleto,
E ten-te lou cor bèn gai ;
As dous mes e pièi pas mai. |
Maintenant qu'il fait chaud,
Ah ! Quel orage,
Devant ma maison,
Quand sur les platanes
La cigale et la cigale de l'Orme
Au grand soleil font du boucan !
Petite cigale,
Fais vibrer tes cymbalettes,
Et tiens-toi le coeur bien gai ;
Tu as deux mois et puis pas plus. |
NB : De nombreux poètes provençaux ont également mis à l'honneur la cigale en poésie et en chanson : Paul ARÈNE, Albert ARNAVIELLE, Baptiste BONNET, Félix GRAS, Louis ROUMIEUX, ...

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- La couquihado / L'alouette huppée :
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrites à Sérignan-du-Comtat en février 1893.
Publié pour la première fois dans l'Armana Prouvençau de 1895.
Version originelle : |
Version provençale en graphie mistralienne : |
Traduction en français
: L'alouette huppée |
Soulèu fali, la couquihado,
Quand dins li nivo a proun sibla,
D’eilamount descènd dins li blad ;
Descènd plan-planet e quihado
Sus lou crestèu di mouto ounte lou grihet dor,
Espincho dóu tremount lou darrié giscle d'or.
Aluco lou mouloun de braso,
L’erso de carboun atuba
Que de nivoulas fan tuba
Eilalin, dóu tèms que s’abraso
La forjo ounte un gigant, lou martèu à la man,
En tres caudo alestis lou soulèu de deman.
Pin-pan ! Lou gigantas travaio
Soun globe, e lou travaio dur.
Pin-pan, pin-pan ! Quand es madur,
Que trelusis e que dardaio,
Arroundi, flame-nòu, reviéuda de bacèu,
D’un cop de pèd lou fai barrula dins lou cèu.
E la boulo de fiò cabusso
Dins li toumple dóu tenebrun...
Tout es enmantela de brun
Pèr la niue, que, bouniasso clusso,
Dessouto lou duvet de la som, di pantai,
Amago l’auceloun, lou grihet, l’ome e l’ai.
« Grand manescau que sus l’enclume
De ta boutigo en nivoulas,
Emé toun martèu jamai las,
D’aquest mounde adoubes lou lume ; »
Se dis la couquihado, « O fabre mestrejant,
Manques pas de blouca toun faudau flamejant !
« Manques pas d’empura dins l’auro
Toun fiò, pèr fin que lou soulèu
Reviéuda nous revèngue lèu,
Aquéu bon souleias que dauro
Li nis e l’espigau ; manques pas, car sara
La fin de tout quand ta forjo s’amoussara.
« A l’auto ansin, plumo espóussado,
Dóu campèstre m’enaurarai
Eilamount, e saludarai
Toun obro, la boulo abrasado,
Alestido de fres ; mi proumié repiéu-piéu
Saran pèr lou soulèu, sèmpre mort, sèmpre viéu. »
Au founs d’uno mato de bauco,
La couquihado alor s’envai ;
Lou cor esmougu, lou gavai
Gounfle de grano de mihauco.
S’agrouvo, met lou bè souto l’alo, à la caud,
E pièi s’endor. A fe dins lou grand manescau. |
Soulèu fali, la couquihado,
Quand dins li nivo a proun sibla,
D’eilamount descènd dins li blad ;
Descènd plan-planet e quihado
Sus lou cresten di mouto ounte lou grihet dor
Espincho dóu tremount lou darrié giscle d'or.
Aluco lou mouloun de braso,
L’erso de carboun atuba
Que de nivoulas fan tuba
Eilalin, dóu tèms que s’abraso
La forjo ounte un gigant, lou martèu à la man,
En tres caudo alestis lou soulèu de deman.
Pin-pan ! Lou gigantas travaio
Soun globe, e lou travaio dur.
Pin-pan ! Pin-pan ! Quand es madur,
Que trelusis e que dardaio,
Arroundi, flame-nòu, reviéuda de bacèu,
D’un cop de pèd lou fai barrula dins lou cèu.
E la boulo de fiò cabusso
Dins lou toumple dóu tenebrun...
Tout es enmantela de brun
Pèr la niue, la bouniasso clusso,
Que souto lou duvet de la som, dóu pantai,
Amago l’auceloun, lou grihet, l’ome e l’ai.
Grand manescau que sus l’enclume
De ta boutigo en nivoulas,
Emé toun martèu jamai las,
D’aquest mounde adoubes lou lume,
— Se dis la couquihado, — o fabre mestrejant,
Manques pas de blouca toun faudau flamejant !
Manques pas d’empura dins l’auro
Toun fiò, pèr fin que lou soulèu
Reviéuda nous revèngue lèu,
Aquéu bon souleias que dauro
Li nis e l’espigau ; manques pas, car sara
La fin de tout quand ta forjo s’amoussara.
À l’auto ansin, plumo espóussado,
Dóu campèstre m’enaurarai
Eilamount, e saludarai
Toun obro, la boulo abrasado,
Alestido de fres ; mi proumié repiéu-piéu
Saran pèr lou soulèu, sèmpre mort, sèmpre viéu.
Au founs d’uno mato de bauco,
La couquihado alor s’envai,
Lou cor esmougu, lou gavai
Gounfle de grano de mihauco.
S’agrouvo, met lou bè souto l’alo, à la caud,
E pièi s’endor. A fe dins lou grand manescau. |
Au soleil pâlissant (Au coucher du soleil), l'alouette huppée,
Quand elle a suffisamment sifflé dans les nuages (nuées),
Descend de là-haut dans les blés ;
Elle descend doucement et perchée
Sur la crête des mottes où le grillon dort,
Elle regarde du lointain le dernier jet d’or.
Elle admire le monceau de braises,
La vague de charbons allumés
Que de gros nuages font fumer
Là-bas, tandis que s'embrase
La forge où un géant, le marteau à la main,
En trois chaudes prépare le soleil de demain.
Pin-pan ! L'énorme géant travaille
Son globe, et le travaille dur.
Pin-pan ! Pin-pan ! Quand il est à point,
Qu'il reluit (brille) et qu’il rayonne,
Arrondi, flambant-neuf, ravivé par les coups (chocs),
D'un coup de pied il le fait balader (rouler) dans le ciel.
Et la boule de feu plonge
Dans le temple (gouffre) des ténèbres...
Tout est mantelé (voilé) de brun
Pour la nuit, la bonnasse couveuse,
Qui, sous le duvet du sommeil et du rêve,
Abrite l'oiselet, le grillon, l'homme et l'âne.
« Grand maréchal qui sur l'enclume
De ta boutique en gros nuages,
Avec ton marteau jamais las,
De ce monde prépares le luminaire,
— Se dit l'alouette, — Oh ! Maître forgeron,
Ne manque pas de boucler ton tablier flamboyant ! ».
« Ne manque pas d'allumer dans le vent
Ton feu, afin que le soleil
Ravivé nous revienne vite bientôt,
Ce bon gros soleil qui dore
Les nids et les épis ; ne manque pas, car ce sera
La fin de tout lorsque ta forge s'éteindra. »
« À l'aube ainsi, plumage secoué,
Des champs je m'élèverai
Là-haut, et je saluerai
Ton œuvre, la boule embrasée,
Préparée de frais ; mes premiers piou-piou
Seront pour le soleil, toujours mort, toujours vivant. »
Au fond d'une touffe d’herbes sèches,
L'alouette alors se retire,
Le cœur ému, le jabot
Gonfle de graines de panic.
Elle s'accroupit, met le bec sous l'aile, au chaud,
Et puis s'endort. Elle a foi dans le grand maréchal. |

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- La crous de l'ase / La croix de l'âne : (Sérignan, 16/11/1893)
Noël
La Crous de l'ase |
Traduction en français
: La croix de l'âne |
L’Agneloun, remenant la co,
Fai : "Mè, mè, mè ; qu’es tout acò ?"
L’Ase respond : "Ai dins la tèsto
Que s’alestis vuei majo fèsto."
"Fèsto de que ?" Lou Biòu repren :
"Oh ! bedigas, manjo toun bren".
La Cabro dis : "Vese uno estello
Que trelusis, mai-que-mai bello."
Lou Gau subran : "Ca-ca-ra-ca !
Dins un maset, lou mèstre es na !"
Dins la sebisso, l’auceliho
Trefoulis de joio, bresiho
Alleluia !,
Alleluia !
Parton. "Hi-han hi-han, hi-han !"
Fai l’Ase que troto davans.
E l’Ase, bourrico mesquino
Arrivè proumié, plen de fe.
Pèr lou recoumpensa, lou mèstre, emé lou det,
Tracè la santo crous lou long de soun esquino. |
L'agnelet, remuant la queue,
Fait : "Mê, mê, mê ; qu’est-ce que c'est tout cela ?"
L’âne répond : "J'ai dans la tête
Qu'il se prépare aujourd'hui fête majeure."
"Fête de quoi ?" reprend le boeuf :
"Oh ! Idiot, mange ton son".
La chèvre dit : "Je vois une étoile
Qui resplendit, extrêmement belle."
Le coq soudain : "Cocorico !
Dans un mas, le maître est né !"
Dans la haie, l’oisillon
Trésaille de joie, gazouille :
Alleluia !,
Alleluia !
Ils partent. "Hi-han hi-han, hi-han !"
Fait l’âne qui trotte devant.
Et l’âne, bourrique mesquine
Arriva premier, plein de foi.
Pour le récompenser, le maître, avec le doigt,
Traça la sainte croix le long de son dos. |

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- L'Ase / L'âne : (Noël, 1890)
L ' A S E |
Traduction en français
: L'ÂNE |
Pèr lou caufa,
À Betelèn, dins un estable,
Sus l'enfantoun, quau a boufa ?
Es iéu, l'ase, lou miserable.
Mai erian dous :
Sus lou front, ma narro tubavo ;
Sus li pèd, lou biòu pietadous
De si caud boufet alenavo.
E l'enfantoun
Ennivoulì pèr la tubèio,
Dins si lagne en pèu de moutoun,
S'estiravo, santo ninèio.
Bèu se fara
E grand, afourtisson li pastre.
Li mage dison : Rèi sara.
L'an legi, la niue, dins lis astre.
E l'ase, ièu,
Assabenti mai que li mage,
Dis l'enfantoun devine un Diéu,
Lou Diéu di fort, di bon, di sage.
Lou mèstre es na
Au founs d'uno grùpio vendrudo.
Ansin dison lis hosanna
Dòu jas à téulisso tepudo.
Car l'umble vèi
I rai de sa fe benurado,
Miés que li mage e que li rèi,
Espeli la causo sacrado.
(Pèr Calèndo 1896) |
Pour le chauffer,
à Bethléem, dans une étable,
sur le petit enfant qui a soufflé ?
C'est moi, l'Âne, le misérable.
Mais nous étions deux :
sur son front, mon naseau fumait ;
sur ses pieds, le boeuf pitoyable
soufflait sa chaude haleine.
Et le petit enfant,
enfoui dans un nuage de buée,
dans ses langes en peau de mouton,
s'étirait, sainte géniture.
Il deviendra beau
et grand, affirment les pâtres.
Les mages disent : il sera Roi.
Ils l'ont lu, la nuit, dans les astres.
Et l'âne, moi,
plus savant que les mages,
dans le petit enfant je devine un Dieu,
le Dieu des forts, des bons, des sages.
Le maître est né
au fond d'une crèche ventrue.
Ainsi disent les "hosanna"
du gîte à toiture herbeuse.
Car l'humble voit
aux rayons de sa foi bienheureuse,
mieux que les mages et que les rois,
éclore la chose sacrée.
(Pour Noël 1896) |

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- La zambougno dóu rèi Dàvi / La cithare du roi David : (07/1890)
La zambougno dóu rèi Dàvi |
Traduction en français
: La cithare du roi David |
Sicut passer solitarius in tecto,
Sicut nyticorax in domicilio
REFRIN :
S’ennuion,
S’ennuion
Sus lou ro de Sio(u)n.
COUBLET 1 :
Lou passeroun sus la téulisso
Piéuto e repiéuto tristamen ;
E tristamen dins la sebisso,
La bouscarlo respond : Amen.
Chut, chut, cessen la charradisso.
Au REFRIN
Tout-aro prendrai ma zambougno,
Farai tibla li sèt courdoun.
E jougarai sus la foufoungno,
Bin-bin, bin-ban bin-ban, bin-boun,
Per li tira d’aquelo mougno,
Bin-bin, bin-ban, bin-ban, bin-boun.
Au REFRIN
La machoto, mai sournarudo,
S’es encaunaudo e reflechis
Dins soun trau. "Que la vido es rudo,
Pleno de mau !", dis e redis
Lou chot-chot de la banarudo.
Au REFRIN |
Sicut passer solitarius in tecto,
Sicut nyticorax in domicilio
REFRAIN :
Ils s’ennuient,
Ils s'ennueient
Sur le rocher de Sion.
COUPLET 1 :
Le passereau sur le toit
Piaille et repiaille tristement ;
Et tristement dans la haie,
La chauvette répond : Amen.
Chut, chut, cessons la discution.
Au REFRAIN
Tout à l'heure je prendrai ma cithare,
Je ferai tendre les sept cordes,
Et je jouerai sur la ,
Bin-bin, bin-ban bin-ban, bin-boun,
Pour les tirer de cette humeur morose,
Bin-bin, bin-ban, bin-ban, bin-boun.
Au REFRAIN
La chouette (petit duc), plus sournoise,
S’est cachée et réfléchit
Dans son trou. "Que la vie est rude,
Pleine de mal" dit et redit
Le hou-hou de la chouette cornue.
Au REFRAIN |

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- Li bericle de Vascò / Les lunettes de Vasco : (1894)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en provençal, le 24/01/1894. Vasco a été un de ses chiens.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
Li bericle de Vascò |
Traduction en français
: Les lunettes de Vasco |
Pèr èstre un brave chin, lou siès, ségur Vascò !
Emé tant de biais portes roupo
De sedo negro sus la croupo,
E boulegues tant bèn lou rampau de ta co
Quand tubo davans tu l'escudello de soupo !
Res dira pas de noun : o siés un bèu chinas,
Emé l'auriho que tirasso
Si frisoun de longo filasso,
Emé lou pitre rous d'un rigau, e lou nas
Grana, negre, lusènt ansin qu'uno rabasso.
Acò 's rèn. As bèn miés. Sus tis iue parpelous,
Bounias e pensatiéu, te vese,
En liogo d'usso, dous gros cese
En belugo de fiò , dos taco de péu rous.
Es li bericle d'or d'un filousofe, crese.
Lou sariés, filoùsofe ? O, lou siés, e bessai
Dounariés leiçoun à toun mèstre
Pèr se trufa dis escaufèstre
E di marrìdi gènt. Sènso ni houi ! ni hai !
Autant vite que iéu rejougnes sant Sivèstre.
Se l'embourigo es caudo e se lou vèntre es plen,
Que t'enchau l'emboui de la vido !
La ventresco en round espandido,
Lou nas souto la co, mesclant li dous alen,
Di chavano dóu jour espères la finido.
Atèndes paciènt, roupihes tranquilas ;
E se perfés de la racaio
Lou cop de pèiro te travaio
Li costo, acò 's pas rèn : pèr suprème soulas,
Alor, la pato en l'èr, coumpisses la muraio.
Aquelo pato en l'èr, signe de toun mesprés
Dis auvàri de la vidasso,
En sagesso, crèi-me, despasso
Tout ço que lis ancian jamai nous an arprés :
Vaqui coume dóu mau lou boulet se tirasso.
Vaqui, moun filousofe, uno responso au mau
Que toun mèstre souvènt envejo.
Aro que l'aveni negrejo,
Dins ti bericle d'or laisso-me vèire un pau
Lou mounde enebria d'un vinas qu'amarejo. |
Pour être un honnête chien, tu l'es, bien sûr, Vasco !
Avec tant de biais tu portes souquenille
De soie noire sur ta croupe
Et tu remues si bien la houppe de ta queue
Quand fume devant toi l'écuelle de soupe !
Personne ne dira non : oui, tu es un beau gros chien,
Avec l'oreille qui traîne
Ses frissons de longue filasse,
Avec la poitrine rousse d'un rouge-gorge, et le nez
Grenu, noir, luisant comme une truffe.
Ce n'est rien. Tu as bien mieux. Sur tes yeux à fortes paupières,
Bonnasses et pensifs, je te vois
En guise de sourcils, deux gros pois chiches
En étincelles de feu, deux taches de poil roux.
Ce sont les lunettes d'or d'un philosophe, je crois.
Le serais-tu philosophe ? Oui, tu l'es, et peut-être
Donnerais-tu leçon à ton maître
Pour se moquer des mésaventures
Et des mauvaises gens. Sans ni hoï ! ni haï !
Aussi vite que moi tu rejoins saint Sylvestre.
Si le nombril est chaud et si le ventre est plein,
Que t'importent les embarras de la vie !
La bedaine en rond étalée,
Le nez dessous la queue, mélangeant les deux souffles,
Des bourrasques du jour tu attends la fin.
Tu attends patient, tu somnoles tranquille ;
Et si, parfois, de la racaille
Le coup de pierre te travaille
Les côtes, ce n'est rien : pour suprême consolation,
Alors la patte en l'air, tu compisses la muraille.
Cette patte en l'air, signe de ton mépris
Des accidents de la vie dure,
En sagesse, crois moi, dépasse
Tout ce que les anciens jamais nous ont appris :
Voilà comme du mal se traîne le boulet.
Quant au mal, mon philosophe, voilà une réponse
Que ton maître souvent envie.
Maintenant que l'avenir s'assombrit,
Dans tes lunettes d'or laisse-moi voir un peu
Le monde enivré d'un gros vin qui tourne à l'amer. |

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- Lou Grapaud / Le crapaud : (07/1890) 
Beaucoup de ses chansons ont été écrites l'été, Jean-Henri FABRE s'inspirait de la saison...
Lou Grapaud |
Traduction en français
: Le crapaud |
REFRIN :
Siéu lou Grapaud,
L’orre animau
À viscouso coudeno,
À boudenflo bedeno,
Que toujour es esta
De tóuti detesta.
COUBLET 1 :
E pamens, de moun iue la bouniasso prunello
Dis proun moun amour de la pas ;
Ciéuclado d’or, de jai, lusis coumo uno estello
Dins lou calabrun di clapas.
Au REFRIN
COUBLET 2 :
E pamens, de ma voues la noto mistoulino,
Campaneto que fai din-din,
Sono de sero, quand toumbo la nivoulino
Dins li valadoun di jardin.
Au REFRIN
COUBLET 3 :
E pamens, de la flour, dóu fru, de l’ourtoulaio,
Siéu lou gardo lou pus ardènt ;
Quiche tavan e verme e caniho, racaio
Que rousigo tout de sa dènt.
Au REFRIN
COUBLET 4 :
E pamens, en furant, la niue, dins la sournuro
Di cantoun e di recantoun,
De marrido vermino, iéu pauras, fau pasturo ;
E moun ruscle n’a jamai proun.
Au REFRIN
COUBLET 5 :
E pamens barrulant quand l’ome se repauso,
Tant qu’es pas leva lou soulèu,
Contro sis ennemi, limas e cacalauso,
Vau faire patrouio pèr éu.
Au REFRIN
COUBLET 6 :
As resoun, moun Grapaud. Te vole, sèns vergnougno
Pèr mi pese, lachugo e flour,
Canta sus lou papié, canta sus la founfougno,
En modo majour e minour. |
REFRAIN :
Je suis le crapaud
L'horrible animal
À visqueuse couenne,
À bedaine enflée,
Qui toujours a été
De tous détesté.
COUPLET 1 :
Et pourtant, de mon oeil la bonasse prunelle
Dit assez mon amour de la paix ;
Cerclé d’or, de jais, elle brille comme une étoile
Dans le clair-obscur des tas de pierres.
Au REFRAIN
COUPLET 2 :
Et pourtant, de ma voix la note frêle,
Clochette qui fait ding-ding,
Sonne le soir, quand tombe la brume
Dans les petits fossés des jardins.
Au REFRAIN
COUPLET 3 :
Et pourtant, de la fleur, du fruit, des plantes potagères,
Je suis le garde le plus ardent ;
J'écrase hannetons et vers et chenilles, racaille
Qui ronge tout de sa dent.
Au REFRAIN
COUPLET 4 :
Et pourtant, en furetant, la nuit, dans l'obscurité
Des coins et des recoins,
De méchantes vermines, moi misérable, je fais pâture ;
Et mon appétit dévorant n’en a jamais assez.
Au REFRAIN
COUPLET 5 :
Et pourtant rôdant quand l’homme se repose,
Tant que n'est pas levé le soleil,
Contre ses ennemis, limaces et escargots,
Je vais faire patrouille pour lui.
Au REFRAIN
COUPLET 6 :
Tu as raison, mon Crapaud. Je te veux, sans honte,
Pour mes petits pois, salades et fleurs,
Chanter sur le papier, chante sur la cornemuse,
En mode Majeur et mineur. |

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- Lou grihoun (Lou grihet) / Le grillon :

Paroles et musique de Jean-Henri FABRE écrites à Sérignan-du-Comtat en juillet 1890.
Publié pour la première fois dans l'Armana Prouvençau de 1893 : "Lou grihet", où J-H. FABRE précise que "bregaloun" correspond à "Aphyllanthes monspeliensis / Aphyllante de Montpellier".
Puis en novembre 1915 dans "Le Gal" n°11.
Remarques : Dans le refrain, les mot "mato" peut être remplacé par "tepo" ou "tousco".
En effet,
la version d'origine de 1893 utilise "tousco" puis sur les deux éditions de 1909 et 1980, on trouve "mato" dans le texte mais la partition sur l'édition de 1980 note "tepo" (qui sonne mieux, "t" étant plus sonore que "m").
De même, FABRE a bien écrit "esmoungu" (que l'on trouve sur les deux éditions avec un "n") mais F.MISTRAL corrige sur le dictionnaire Lou Tresor Dóu Felibrige car il faut bien dire "esmougu". Or la version d'origine est bien sans "n", il a été rajouté après.
Enfin, les deux éditions finissent le texte par le refrain alors que la partition finit par le couplet suivi de l'onomatopée du grillon jouée par l'harmonium.
Lou Grihoun |
Traduction en français
: Le grillon |
Cri-cri, cri-cri, fai lou grihoun,
Aqui dessouto
Dins uno mouto ;
Cri-cri, cri-cri, fai lou grihoun,
Dins la mato de bregaloun. (Bis)
Sus lou lindau de sa cabano,
Ounte jamai s’es atuba calèu,
Pichot Grihet friso si bano,
Lou vèntre au fres e l’esquino au soulèu.
Dóu negrun de sa caumo sourno,
Es remounta sus lou cop de miejour ;
Es remounta de sa cafourno
E pren sa part di joio dóu plen jour.
Vaqui perqué sa grosso tèsto
Banejo tant.
Grihet, tout esmou(n)gu,
Pèr celebra la grando fèsto,
Em’ un vióuloun sus sa porto es vengu.
- Qu’es bèu lou soulèu que dardaio,
Se dis : qu’es bon lou rai de sa calour,
Rai que m’arrivo entre li paio
Dóu bregaloun tout azuren de flour !
Ô bèu soulèu, tu siés la vido
De tout : tavan, luseto e mousquihoun !
Escouto un pau, glòri esplendido,
En toun ounour l’èr d’un paure Grihoun.
Cri-cri, cri-cri, fai lou Grihoun,
Aqui dessouto
Dins uno mouto ;
Cri-cri, cri-cri, fai lou Grihoun
Dins la mato de bregaloun.
(Lou grihoun canto). |
Cri-cri, cri-cri, fait le grillon,
Ici dessous
Dans une motte ;
Cri-cri, cri-cri, fait le grillon,
Dans la touffe d'aphyllante. (Bis)
Sur le seuil de sa cabane,
Où jamais ne s’est allumé une lampe à huile,
Petit Grillet se frise les ailes,
Le ventre au frais et le dos au soleil.
De l'obscurité de son terrier sombre,
Il est remonté sur le coup de midi ;
Il est remonté de sa caverne
Et prend sa part des joies du jour.
Voici pourquoi sa grosse tête
Remue tant les antennes. Grillet, tout ému,
Pour célébrer la grande fête,
Avec un violon sur sa porte est venu.
- Qu’il est beau le soleil qui reluit,
Se dit-il : qu’il est bon son rayon de chaleur,
Rayon qui m’arrive entre les pailles
De l'aphyllanthe tout azuré de fleurs !
Ô beau soleil, tu es la vie
De tout : hannetons, vers-luisant et moucherons !
Écoute un peu, gloire splendide,
En ton honneur, l’air d’un pauvre grillon.
Cri-cri, cri-cri, fait le grillon,
Ici dessous
Dans une motte ;
Cri-cri, cri-cri, fait le grillon
Dans la touffe d'aphyllanthe.
(Le grillon chante). |
Discographie / Enregistrements :
- CD "Parlo fièr toun prouvençau !" par Escamandre (Ed. Escamandre, 2022)
-
Enregistrement par Thibaut PLANTEVIN (Ed. Ventoux Musique, 2021)
- CD "Resista" par le duo CHEOPS (Ed. 2005)

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- Lou Lusert / Le lézard : (08/01/1890)
Cette petite chanson était une des préférées de J-H. FABRE. Quand il s'asseyait à son harmonium, il disait qu'il allait faire "brama lou lusert" (entendre le lézard) !
Le quatrain du refrain est un dicton provençal (que l'on trouve dans le Trésor du Félibrige avec cette explication : "On prétend que le lézard fait le guet autour de ceux qui dorment aux champs et qu'il les réveille si un animal dangereux les menace") : il porte donc bonheur.
Lusert, lusert,
Aparo-me di serp :
Quand passaras vers moun oustau,
Te dounarai un gran sau.
Lou Luzert (Lou Limbert) |
Traduction en français
: Le lézard |
Emé toun esquino emperlado,
Brave lusert di bouissounado,
De l’ome, dison, siés l’ami.
Paro-me, paro-me de mis enemi,
Dóu coulobre, de la rassado !
Paro-me, paro-me de mis enemi.
Lusert, lusert,
Paro-me de la serp :
Dóu coulobre, de la rassado ;
E quand vendras,
Quand passaras
Vers moun oustau,
Te dounarai un gran sau. |
Avec ton dos orné de perles,
Brave lézard des buissons,
De l'homme, dit-on, tu es l'ami.
Protège-moi, protège-moi contre mes ennemis,
La couleuvre, la rassade, (gros lézard ocellé à la peau bleuâtre)
Protège-moi, protège-moi de mes ennemis.
Lézard, Lézard,
Protège-moi des serpents :
De la couleuvre, de la rassade.
E quand tu viendras,
Quand tu passeras
Vers ma maison,
Je te donnerai un grain de sel. |

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- Lou moulin / Le moulin : (07/1890)
Une comptine qui ne parle pas d'insectes !
Lou moulin |
Traduction en français
: Le moulin |
Pèr l’enfantoun
Uno cansoun
Courto e nouvello,
Mai que mai bello
Sus lou moulin.
Viro, viro, viro, viro, viro, viro.
Lou moulin,
Quand lou vent boufo. es bèn en trin.
Tic-tac, tic-tac, tic-tac,
Tic-lac, tic-tac tic-tac.
La farino es prèsto,
À deman lou rèsto. |
Pour le petit enfant
Une chanson
Courte et nouvelle,
Plus que belle
Sur le moulin :
Tourne, tourne,
Le moulin,
Quand le vent souffle, c'est bien
Tic-tac,
Tic-tac.
La farine est prête,
À demain le reste. |

[Remonter]
- Lou Quinsard / Le pinson : (07/1890)
Lou Quinsard |
Traduction en français
: Le pinson |
Un bèu Quinsard a fa soun nis
De bourro, de crin e de lano,
Dins lou jardin, sus li platano.
Ai vist parti lou cago-nis.
Bon vouiaje, l’auceliho,
Longo-mai fasès famiho.
Re-piéu, piéu, piéu, piéu, piéu, piéu
Lou Quinsard canto,
Lou Quinsard canto
Re-piéu, piéu, piéu, piéu, piéu, piéu
Vaqui l’estiéu,
Vaqui l’estiéu. |
Un beau pinson a fait son nid
De bourre, de crins et de laine,
Dans le jardin, sur les platanes.
J'ai vu partir le dernier-né.
Bon voyage, petits oiseaux,
Longue vie faites famille.
Cuicui, cuicui,
Le pinson chante,
Re cuicui, cuicui,
Voici l'été. |

[Remonter]
- Lou Semenaire / Le semeur : (Sérignan, 11/02/1894)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE. Publié en 1895.
Lou Semenaire |
Traduction en français
: Le semeur |
Soulenne coume un diéu, l’ome à braio sarcido,
L’ome à large pitre pelous,
Lou noble espeiandra, lou baroun di caussido,
Lou semenaire, usso frounsido
E péu esfoulissa sus lis iue parpelous,
Brassejo dins li champ. La ventrudo boudougno
D’un sa plen ié pendoulo au còu.
A-de-rèng, di dos man, au founs de la besougno,
L’ome pesco, espandis si pougno
D’un gèste d’emperaire e benesis lou sòu.
Ansin quand sus l’autar lou gros cire s’atubo,
Lou bèu jour de Pasco vengu ;
Quand l’ourgueno brusis, piou ; quand l’encèns tubo
E d’un blu nivoulun estubo
Lou frount clin di fidèu, tremoulant, esmougu ;
L’evesque tout-d’un-tèms s’aubouro, mitre en tèsto,
Crosso en man, lou det anela
D’ametisto : un moumen, majestuous d’un gèsto
De soun det, pèr coumpli la fèsto,
Fai uno crous d’amount, d’avau, d’eici, d’eila.
Lou pountife, ufanous dins sa glòri, semeno
L’apasimen ; dins li cor las
Vuejo la santo eigagno, e de soun signe ameno,
Pèr li lagno de touto meno,
Un brigoun d`ideau, lou suprèrne soulas.
L’autre, l’espeiandra, pountife à braio routo,
A pèr gros cire lou soulèu,
Lou luminàri d’or que dardaio à la vouto
Dóu tèmple, e fegoundo li mouto
Emé li rai de soun escalustrant calèu.
A lou cèu azuren pèr autar. Sa capello,
Tapissado de satin blu,
Dóu sublime velout di nivo s’enmantello ;
E la viholo dis estello
Davans lou tabernacle atubo si belu.
Pèr ourgueno a lou tron, la fourmidablo basso
Que brusis lis inne sacra,
Quand l`aurige se found en plueio tousco, e passo,
Espoumpissènt li terro lasso
E revihant li germe en si lachun sucra.
E de mignot clerjoun, à la voues mistoulino,
Fan : alleluia, riéu-piéu-piéu !
Quinsoun e seresin, bouscarlo e cardelino
Que porto roujo capelino,
Bresihon si moulet à la glòri de Diéu.
Pèr encèns, dins li flour, en liogo de naveto,
Se soun amassa de perfum
Que lis encensié d’or, dins si canesteleto
Escrincelado e pendouleto,
Enauron douçamen sènso ni fiò ni fum.
Gousié meravihous, subran la couquihado,
Finido soun Adouracioun
Au nis, part, tout dre mounto ansin qu’uno fusado,
Mounto en cantant, pièi enaussado,
Invesiblo, amoundaut siblo l’Elevacioun.
De l’evesque, à respèt, qu’es la magnificènço !
L’autre, emé la taiolo i ren,
A tout pèr éu, alor qu’en brassejant coumenço
Lou sant óufice di semenço
Que fai de pan pèr l’ome, e pèr l’ase de bren. |
Solennel comme un dieu, l'homme au pantalon ravaudé,
L'homme à large poitrine velue,
Le noble loqueteux, le baron des chardons,
Le semeur, sourcils froncés
Et cheveux ébouriffés lui descendant sur les paupières,
Gesticule dans les champs. La bosse ventrue
D'un sac plein lui pend au cou.
À tour de rôle, des deux mains, au fond de la chose,
L'homme puise ; il étale ses poings
D'un geste d'empereur et il bénit le sol.
Ainsi quand sur l'autel le gros cierge s'allume,
Le beau jour de Pâques venu ;
Quand l'orgue bruit, pieux ; quand l'encens fume
Et d'une nuée bleue de nuages parfume
Le front penché des fidèles, tremblants, émus ;
L'évêque soudain se dresse, mitre en tête,
Crosse en main, le doigt annelé
D'améthyste ; un moment, majestueux, d'un geste
De son doigt, pour terminer la fête,
Il fait une croix en haut, en bas, d'ici, de là.
Le pontife, magnifique en sa gloire, sème
L'apaisement ; dans les cœurs las
Il verse la sainte rosée, et de son signe amène,
Pour les soucis de tout genre,
Un peu d'idéal, suprême soulagement.
L'autre, le loqueteux, pontife à culotte délabrée,
A pour gros cierge le soleil,
Le luminaire d'or qui resplendit à la voûte
Du temple, et féconde les mottes
Avec les rayons de son éblouissant lampion.
Il a le ciel azuré pour autel. Sa chapelle,
Tapissées de satin bleu,
Du sublime velours des nuées se recouvre ;
Et la veilleuse des étoiles
Devant le tabernacle allume ses lueurs.
Pour orgue, il a le tonnerre, la formidable basse
Qui bruit les hymnes sacrées,
Quand l'orage se résout en pluie tiède, et passe
Imbibant les terres fatiguées
Et réveillant les germes en leurs laitages sucrés.
Et de mignons enfant de chœur, à douce voix,
Font : alleluia, riou-piou-piou !
Pinson et serin, fauvette et chardonneret
Qui porte rouge capeline,
Brésillent leurs motets à la gloire de Dieu.
Pour encens, dans les fleurs en guise de navettes,
Se sont amassés des parfums
Que les encensoirs d'or, dans leurs petites corbeilles
Ciselées et pendantes,
Exhalent doucement sans feu ni fumée.
Gosier merveilleux, soudain l'alouette huppée,
Finie son Adoration
Au nid, part, tout droit monte ainsi qu'une fusée ;
Elle monte en chantant ; puis, élevée,
invisible, là haut elle siffle l'Élévation.
De l'évêque, en comparaison, qu'est la magnificence !
L'autre, avec la ceinture rouge aux reins,
A tout pour lui, alors qu'en gesticulant il commence
Le saint office des semences
Qui fait du pain pour l'homme, et pour l'âne du son. |

[Remonter]
- Lou Tavan canto / Le hanneton chante : (03/07/1890)
Comptine consitant à imiter le bruit du vol du hanneton.
Lou Tavan canto |
Traduction en français
: Le hanneton chante |
N’agues pas pòu pichot enfant,
Es un tavan, es un tavan
Rous coume l’or. Ve si baneto.
Ardit ! Pren-lou dins ta maneto,
E pièi, vounvoun, vounvoun, vounvoun,
Te jougara de soun vióuloun.
|
N'ayez pas peur petits enfants,
C'est un hanneton, c'est un hanneton
Roux comme l'or.
Regarde ses antennes.
Hardit ! Prends-le dans ta petite main,
Et puis, "crincrin",
Il te jouera de son violon. |

[Remonter]
- Nene som-som / Dodo, l'enfant do : (07/1890) 
Berceuse. Comptine pour endormir un petit enfant.
NB : Au début du refrain,
la partition donne "nono-nono" et le texte donne "nené-nené" !
Or la fin rime avec "enfantounet" et donc avec "nené". Mais dans le langage populaire, on disait plutôt "nono". On peut donc faire un mélange des deux : "Fai toun nono, fai toun nené".
À la fin, selon les versions de texte (éditions 1909 et 1980), on trouve soit "e fai toun nené" soit "e fai néné", alors que la partition donne "e fai-ai nené". La version "e fai toun nené" étant mieux pour l'articulation et le rythme du chant.
Nene som-som |
Traduction en français
: Dodo, l'enfant do |
Enfantounet, pichot bramaire,
Fai toun nono,
Fai toun nené.
Enfantounet, pichot bramaire,
Escouto aquest èr de ta maire :
Tu siés moun bèu, moun perdigau,
La figo d’or que me fai gau ;
Mai brames trop, enfantounet.
Taiso-te dounc e fai nené. |
Petit enfant, petit braillard,
Fais ton dodo,
Fais ton dodo.
Petit enfant, petit braillard,
Écoute cet air de ta maman :
Tu es mon beau, mon perdreau,
La figue d'or qui me réjouit la vue ;
Mais tu brailles trop, petit enfant.
Tais-toi donc et fais dodo.
|
Discographie / Enregistrement :
-
Enregistrement par Thibaut PLANTEVIN (Ed. Ventoux Musique, 2021)

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- Nouvè : Alleluia, La cardelino / Le chardonneret : (12/1894) 
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE : Noël !
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
Nouvè : La cardelino
Version originelle |
Version en graphie mistralienne |
Traduction en français
: Noël le chardonneret |
La cardelino :
Alleluia !
Lou mestr' es na.
Veni, Nana, veni Nana
Veir' emé ièu la maire santo.
Ansin la cardelino canto.
Lou quinsard :
Mai lou quinsard,
Lou gros bavard
Dis : "Es trop tard, dis es trop tard.
Dis es trop tard, dis es trop tard.
Amaguen-nous dins la cassino
À la sousto de la plouvino,
Amaguen-nous dins la cassino,
À la sousto de la plouvino.
Car es trop tard, car es trop tard.
Car es trop tard, car es trop tard !
Nana :
Nana respond, lou det sus sa bouqueto
De mignot enfantoun de la :
Se fai trop niue, prenguen quatre brouqueto ;
Parten, parten, l'ase nous pourtara.
L'ase :
Hi-ho, Hi-han !
Hi-ho, Hi-han !
Viedase, Fai l'ase :
Sarias cènt milo e mai,
Poudès me crèire,
Vous pourtarai
Pèr ana vèire,
Nascu sus quatre paio, au lume d'un calèu,
Lou grand mèstre di prat, di fen e dóu soulèu. |
La cardelino :
"Alleluia !
Lou mèstre es na.
Vène, Nana, vène Nana
Vèire emé iéu la maire santo."
Ansin la cardelino canto.
Lou quinsard :
Mai lou quinsard,
Lou gros bavard
Dis : "Es trop tard, dis es trop tard.
Dis es trop tard, dis es trop tard.
Amaguen-nous dins la cassino
À la sousto de la plouvino,
Amaguen-nous dins la cassino,
À la sousto de la plouvino.
Car es trop tard, car es trop tard.
Car es trop tard, car es trop tard !"
Nana :
Nana respond, lou det sus sa bouqueto
De mignot enfantoun de la :
"Se fai trop niue, prenguen quatre brouqueto ;
Parten, parten, l'ase nous pourtara."
L'ase :
"Hi-ho, Hi-han !
Hi-ho, Hi-han !
Viedase, Fai l'ase :
Sarias cènt milo e mai,
Poudès me crèire,
Vous pourtarai
Pèr ana vèire,
Nascu sus quatre paio, au lume d'un calèu,
Lou grand mèstre di prat, di fen e dóu soulèu." |
Le chardonneret :
"Alléluia !
Le maître est né.
Viens, Nana, viens Nana
Voir avec moi la sainte mère."
Ainsi le chardonneret chante.
Le pinson :
Mais le pinson,
Le gros bavard,
Dit : "C'est trop tard, c'est trop tard.
Il dit : "C'est trop tard, c'est trop tard,
Blotissons-nous dans la maison,
À l'abri de la bruine,
Blotissons-nous dans la maison,
À l'abri de la bruine,
Car il est trop tard, car il est trop tard,
Car il est trop tard, car il est trop tard !"
Nana :
Nana répond, le doigt sur sa petite bouche
De mignon enfant de lait :
"S'il fait trop nuit, prenons quatre allumettes ;
Partons, partons ; l'âne nous portera."
L'âne :
"Hi-ho, Hi-han !
Hi-ho, Hi-han !
Couillons, fait l'âne,
Seriez-vous cent mille et plus,
Vous pouvez me croire,
Je vous porterai
Pour aller voir,
Né sur quatre brins de paille, à la lueur d'une lampe à huile,
Le grand maître des prés, des foins et du soleil." |
NB : Dans la première strophe, on trouve deux versions : "Vène, Nana, vène Nana" dans le texte de FABRE et "Veni, Nana, veni Nana " dans sa partition. La bonne version devrait être "Vène, Nana, vène Nana" car "veni" est une forme utilisée en maritime et en languedocien pour le présent ("Je viens") mais pas à l'impératif ("Viens"). Peut-être chantait-il "Vèni vèni" qui sonne mieux pour une chanson enfantine ? ou est-ce une déformation de son origine du sud-ouest ?

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- Pèu de loup / Peau de loup : (Sérignan, 03/1894)
Pèu-de-loup |
Traduction en français
: Peau de loup |
Pèu-de-loup, toun pebroun s’atubo
As uno barjo de camèu ;
Pèu-de-loup, ta cambo titubo.
Es mai passa sout lou ramèu.
En rintrant, tout renous, à la femo qu’espargno,
A la pauro Claroun espóussaras lis argno.
Bregand ! i’estrassaras la pèu !
Pèu-de-loup, la bello mounino
Qu’as acampado ! Quete nas,
Quete plumet e queto mino
Apudentido de vinas !
Fai ti cadèu, gros porc, de-long de la muraio,
Fai ti cadèu ! pièi vai t’escoundre dins la paio.
Au-mens ges de bacèu, gusas !
Pas mai ! Moussu fara tintèno
E sacrejara, noum de noun !
Acò ‘s sèmpre sa turlutèno
Quand a toumba quàuqui canoun,
Li poung fa, gaugno en fiò, la parpello abestido
Toumbara sus Claroun, la pauro adoulentido,
E l’ensucara, lou capoun !
Sian à taulo. – Es trop salado,
Ta soupo, dis ; as pas pebra
La fricassèio ; à l’ensalado
I’a ges d’aiet, foutri, foutra !...
N’en vos, tè ve-n’aqui ; flic, flac ! panoucho, trueio...
– Tout plouro dins l’oustau, la maire, la ninèio ;
Mai lou dimenche es celebra. |
Peau de loup, ton nez rouge s’allume,
Tu as une bouche de chameau :
Peau de loup, la jambe titube.
C’est encore passé sous le rameau.
En rentrant, de mauvaise humeur, à la femme qu’il épargne.
À la pauvre petite Claire tu secoueras les furoncles.
Brigands ! Vous lui déchirerez la peau !
Peau de loup, la belle guenon
Que tu as rassemblée ! Quel nez,
Quel pelage et quelle mine
Puante de vins !
Vomis, gros porc, le long de la muraille,
Fais ton chef ! Puis vas te cacher dans la paille.
Au moins pas de gifle, gueux !
Pas plus ! Monsieur fera tiretaine
Et il sacrera, non de non !
Cela est toujours sa turlutaine
Quand sont tombés quelques canons,
Les poings faits, joue en feu, la paupière hébétée,
Il tombera sur Petite Claire, la pauvre souffrante,
Et il l’ensuquera, le chapon !
Nous sommes à table. – C’est trop salé,
Ta soupe, dis-tu ; tu n’as pas poivré
La fricassée (fressure de cochon) ; dans la salade
Il n’y a pas d’ails, colère !...
Tu en veux, tiens, viens ici ; flic, flac ! vieux chiffon, truie...
– Tout pleure dans la maison, la mère, les enfants ;
Mais le dimanche est célébré. |

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II) Chansons en français :
- La chouette et la cigale : (1899)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français, en novembre 1899.
COUPLET N°1 :
Et zon, zon, zon, zon ! faisait la Cigale
Sur un olivier, certain jour d'été ;
Et zon, zon, zon, zon ! sans fin répété,
Son chant raisonnait en cadence égale.
C’était leur propice aux douceurs du sommeil,
Alors que le Lézard de lassitude bâille,
Cherche l’ombre et titube au pied de la muraille,
Énervé de chaleur est grisé de soleil.
COUPLET N°2 :
Et zon, zon, zon, zon ! De la canicule
Elle célébrait l’âpre embrasement,
Toujours plus criarde et sans un moment
De trêve et repos jusqu’au crépuscule.
Or le même olivier, en son tronc ténébreux
Tout carié, donnait le gîte à la Chouette,
Qui, de nuit, sort et chasse, au clair de lune guette
Le Mulot ; puis, de jour médite dans son creux.
COUPLET N°3 :
Et zon, zon, zon, zon ! Amis du silence,
L’oiseau taciturne et méditatif,
Enfin ennuyé du récitatif,
Ne pouvant dormir, perdu patience.
"Modère-toi, voisine, et suspend ton couplet,
Lui disait la chouette ; au lever de l’aurore
J’ai regagné ma loge et je n’ai pas encore
Fermé l’œil. Laisse-moi reposer, s’il te plaît."
COUPLET N°4 :
Et zon, zon, zon, zon ! Plus opiniâtre,
Sachant que là-bas on se tourmenter,
Le rauque concert toujours persistait,
D’un ton ricaneur, goguenard, folâtre.
"Tu ne veux pas te taire, ô pécore ! Suffit.
Je t’y forcerai bien, se disait la Chouette.
Râcleuse de guimbarde, oui, tu seras muette,
Car je supprimerai ton instrument maudit."
COUPLET N°5 :
Et zon, zon, zon, zon ! "Céleste cigale,
Chantre aimé des dieux, avant que le soir
Tombe, viens un peu sans façon me voir,
Nous boirons un coup. C’est moi qui régale.
"Écoute : en furetant, j’ai trouvé, cette nuit,
La cave du mulot dans un tas de pierrailles ;
Et j’ai pris dans un coin, derrière les futailles,
Pour le boire à nous deux, un flacon de vin cuit."
COUPLET N°6 :
Plus de zon, zon, zon. Repos. La chanteuse,
Qui brûlait de soif, entendant vanter
Son talent d’artiste, accourt déguster
Du riche Mulot la liqueur flatteuse.
Le flanc sec, aussitôt elle arrive au vol ; mais
L’autre, qu’il attendait sur la porte, la happe,
D’un adroit coup de bec à la nuque la frappe,
L'avale, et c’est fini pour toujours et jamais.
Vous, enfants tapageurs, passionnés de cymbale,
De fifre et de tambour, sans pitié pour qui dort,
Respectez le silence et méditer le sort
Qui mit fin aux chansons de la pauvre cigale. |

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- La damo-de-gandolo / La libellule : (15/12/1899) 
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
En Provence, on compte 60 espèces de libellules. On distingue les Anisoptères (libellules) et les Zygoptères (demoiselles, plus fines : dont les plus connues sont les agrions).
La damo-de-gandolo / La damisello /
Lou pougne-serp / Lou cavo-l'uei / Lou roumpe-vèire |
Traduction en français
: La libellule |
Ah ! Coumo es bello,
En ribo d'aigo
Ah ! Coumo es bello,
La damisello,
Rèino
di jounc e di canèu !
Aletejo
Countinuousamen
Aletejo
De cambo en cambo
Que l'aigo fai trembla plan-planet. |
Ah ! Qu'elle est belle
Au bord des eaux ;
Ah qu'elle est belle,
La demoiselle,
Reine des joncs et des roseaux ! (bis)
Elle voltige
Incessamment,
Elle voltige
De tige en tige
Que l'eau fait trembler doucement. (ter)
Silencieuse,
À travers l'air ;
Silencieuse,
Capricieuse,
Elle passe comme un éclair.
Elle s'élance,
S'en va, revient ;
Elle s'élance,
Puis se balance
Au bout du jonc qui la soutient. (ter)
Elle a quatre ailes
Teintes de roux ;
Elle a quatre ailes,
Riches bretelles,
Dont nos tissus seraient jaloux.
Droit, cylindrique,
Prompt à l'essor ;
Droit, cylindrique,
Tout métallique,
Son corps s'allonge en lingot d'or. (ter)
Et que fait-elle,
Allant, venant ;
Et que fait-elle,
La demoiselle,
Avec son costume élégant ?
Elle travaille,
Non sans danger ;
Elle travaille,
Chasse et bataille,
Pour acquérir de quoi manger. (ter)
Car la paresse,
Sachez-le bien,
Car la paresse,
Dans la détresse,
À nul de nous n'apporte rien. (ter) |

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- Le chant du grillon : (1899)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français, le 30/12/1899.
COUPLET N°1 :
Sur le seuil de son domicile,
Dans une touffe de gazon,
Cri-cri, cri-cri ! fait le Grillon.
Simple de goût, d’humeur facile,
Le ventre au frais et le dos au soleil,
Du mois d’avril il chante le réveil.
REFRAIN :
De sa cachette,
Parmi le gazon ;
De sa cachette,
Où l'herbe projette
Ombre discrète,
Cri-cri...
COUPLET N°2 :
Lui, le modeste et le rustique,
Lui, solitaire en son terrier,
S’est avisé d’être luthier
Et de se faire une musique
Qui joint sa note au grand concert des champs
Quand sonne en plein l'hosanna du printemps.
COUPLET N°3 :
Il possède une mandoline
Avec un archer harmonieux.
Son appareil ingénieux
Lui vibre au-dessus de l’échine,
Car de son aile, on ne sait trop comment,
Il s’est construit un sonore instrument.
COUPLET N°4 :
Pour honorer la grande fête,
La célébrer aux alentours,
Il a mis ses plus beaux atours ;
Fins plumets sur sa grosse tête,
Justaucorps noir mieux lustré que satin,
Et sur la cuisse un galon de carmin.
COUPLET N°5 :
Autour de lui mille fleurettes
À profusion, dans tous les sens,
Brûlent le camphre pour encens
Tout au fond de leurs cassolettes.
Ces humbles sont, en leur simplicité,
Les encensoir de la solennité.
COUPLET N°6 :
Les meilleurs ce sont les modestes.
Que faut-il pour glorifier
Le printemps, pour sanctifier
L’éveil et les fêtes agrestes
Des champs, des bois, des prés et des sillons ?
-
Petites fleurs et concert de grillons.
AU REFRAIN |

[Remonter]
- Le corbeau et le fromage : (1895)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français, en décembre 1895.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
NB : Ici, J-H;FABRE prend sa revanche sur la fable de Jean de LA FONTAINE pour rétablir la vérité.
I)
Un jour, dit-on, maître Corbeau
Découvrit sur une fenêtre
Un fromage comme peut-être
On n'en verra plus d'aussi beau.
La savoureuse victuaille
En crème s'épanouissait
Et doucement se mûrissait
À l'air sur quatre brins de paille.
Le trouvant fait au point voulu,
Malgré les cris de la fermière,
Qui, sur le seuil de sa chaumière,
Du poing menaçait le goulu,
L'oiseau se sait du fromage,
Griffe d'ici, griffe de là,
Et pour le manger s'envola
Sur
un arbre du voisinage.
II)
"Ah ! qu'il est bon,
Se disait le larron,
C'est bien meilleur qu'un reste de carcasse,
Ô
mets divin !
Si moelleux et si fin,
En ton honneur, par trois fois je croasse."
Puis bec d'aller,
Pif, paf ! et d'avaler
Par gros morceaux, la croûte avec la crème.
Un flot de lait
Grassement ruisselait
Sur le jabot tendu, gonfle à l'extrême.
Faute de thé
A temps ingurgité,
Maître Corbeau périt de la bombance,
Car le glouton
Se gorgea, nous dit-on,
Jusqu'à crever le bissac de sa panse.
III)
Il méritait, le goinfre, un pareil sort.
C'est ce que lui dit la fermière,
Qui le lendemain, la première,
Sur un buisson rencontra l'oiseau mort. |

[Remonter]
- Le crapaud désobéissant : (?)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
Écoutez tous en frémissant
L'histoire courte et véritable
D'un crapaud désobéissant
Qui fit une fin lamentable, lamentable, lamentable.
Il avait ventre rondelet,
Gilet nankin, casaque brune,
Il aimait à courir seulet,
Parmi les choux au clair de lune.
Sa mère lui disait souvent :
« Petit, prends garde, petit prends garde, petit prends garde à la chouette !
Du haut d'un arbre, à tout moment,
De ses gros yeux, de ses gros yeux, elle te guette ;
« Prends garde ! » Mais le polisson
Rit du conseil, fit à sa tête,
Alla chez le colimaçon
Sauter un peu, faire la fête.
Malheur ! La chouette était là,
Pas loin, pas encore couchée !
Elle le prit et l'avala
Tout cru, d'une seule bouchée.
Obéis donc, enfant, quand la mère a parlé,
Sinon, par le hibou tu seras dévoré. |

[Remonter]
- Le grillon et le papillon : (1893)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français, en décembre 1893.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
NB : En France, on compte plus de 200 espèces de sauterelles, criquets et autres grillons. Et en Provence, il existe 260 espèces de papillons, les plus connus étant le sphinx et le flambé.
L’histoire des bêtes rapporte
Qu’autrefois un pauvre grillon,
Prenant le soleil sur sa porte,
Vit passer un beau papillon ;
Un papillon à longues queues,
Superbe, des mieux décorés,
Avec rang de lunules bleues,
Galons noirs et cercles dorés.
« Vole, vole, lui dit l’ermite,
Sur tes fleurs du matin au soir ;
Ta rose ni ta marguerite
Ne valent mon humble manoir, ne valent mon humble manoir, manoir. »
Il disait vrai. Vient un orage,
Et le papillon est noyé
Dans un bourbier ; la fange outrage
Le velours de son corps broyé.
Mais la tourmente en rien n’étonne
Le grillon qui, sous son abri,
Qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il tonne,
Vit tranquille et chante cri-cri !
Ah ! N’allons pas courir le monde
Parmi les plaisirs et les fleurs.
L’humble foyer, sa paix profonde,
Nous épargneront bien les pleurs. |

[Remonter]
- Le hanneton : (1900)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français, le 1er janvier 1900 ! Bonne année !
NB : Ne pas confondre avec Lou Tavan.
COUPLET N°1 :
Or, attaché par une patte
Comme une bête scélérate,
Au bout d'un long fil de coton,
Vire dans l'air le hanneton.
REFRAIN :
Au bout d'un long fil de coton,
Ton-ton, ton-ton, tontaine, ton-ton,
Vire dans l'air le Hanneton,
Ton-ton, ton-ton, tontaine, ton-ton !
Ton-ton, ton-ton, tontaine, ton-ton !
COUPLET N°2 :
Il dormait sur les aubépines,
À farouche armure d'épines ;
Il dormait grisé par les fleurs
Et les capiteuses senteurs.
COUPLET N°3 :
Des enfants sont venus. L'arbuste
Secoué par le plus robuste
A laissé tomber l'endormi,
Immobile, mort à demi.
COUPLET N°4 :
Mise au soleil, la pauvre bête
Reprend ses sens, hoche la tête,
Ouvre ses cornes à feuillets,
Les meut en gestes inquiets.
COUPLET N°5 :
Le ventre doucement palpite ;
Hors de l'étui roux qui l'abrite
L'aile s'étale. Le captif
Est bel et bien, non mort, mais vif.
COUPLET N°6 :
Il est des bons ! Vite une boîte
Où se loge en cellule étroite,
Avec feuillage de peuplier,
L'inestimable prisonnier.
COUPLET N°7 :
Et le voici qui vire, vire,
Monte, descend, plonge, chavire ;
Dans le ciel bleu, triste profil,
Le galérien traîne son fil.
COUPLET N°8 :
Le forçat tire sur sa chaîne
Tant qu'il peut. Sa perte est prochaine ;
Il le sent et veut fuir au loin
Pour se cacher en un recoin.
COUPLET N°9 :
Indifférents à son supplice,
Les enfants, cruels sans malice,
"Vole, vole", lui disent-ils.
Ah ! les méchants, eux si gentils !
COUPLET N°10 :
Autour du patient la bande
Chante et sutille en sarabande.
Quand, soudain, le fil de coton
Se casse. Adieu le Hanneton.
Dernier REFRAIN :
Soudain, le long fil de coton,
Ton-ton, ton-ton, tontaine, ton-ton,
Se casse. Adieu, le Hanneton,
Ton-ton, ton-ton, tontaine, ton-ton,
Ton-ton, ton-ton, tontaine, ton-ton.
COUPLET N°11 :
Il part, bien loin, - De cette fuite
Consolons-nous, et tout de suite :
C'est pour le pauvre tourmenté,
Le plus grand bien, la liberté. |

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- Le loup et la cigogne : (mars 1895) 
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
1) Des restes d'un vieux mouton
Ayant un jour fait ripaille,
Le loup, vorace glouton,
Faillit crever sur la paille.
Dans son gosier trop pressé,
Tout un os de côtelette,
Faute d'être assez graissé,
S'arrêta vers la luette.
Le loup étouffé râlait,
Œil mourant, lèvre baveuse ;
Et soufflait, grognait, hurlait,
Ouvrait une gueule affreuse.
On disait : "Il va périr,
Le bandit !" quand la cigogne
Entreprit de le guérir.
Oh ! La terrible besogne !
2) Son long bec, tout doucement
Dans le gosier redoutable
Plongea, puis adroitement
Opéra le misérable.
Han ! Un, deux ! Cric-crac ! C'est fait
Sans douleur. L'opératrice
Rejetant l'os attendait
Un merci pour son service.
Rien ! Le loup hors de danger
Mit la cigogne à la porte,
Menaçant de la manger
Quelque jour ou vive ou morte.
Oh ! Le vilain animal !
Fi du loup, bête méchante
Qui pour le bien rend le mal.
Fi de la bête puante ! |
NB : Dans le second couplet, on trouve deux versions : "Rien !" sur le texte écrit par FABRE et "Bien !" sur la partition.

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- Le petit lapin : (1895)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français, le 08/03/1895.
NB : Rythmique à 5 temps.
COUPLET N°1 :
Petit lapin
Qui, le matin,
Parmi les fleurs trottines
Et qui sur le gazon
Fais sonner le talon
De tes hanches bottines.
COUPLET N°2 :
Je le connais,
Moi, le palais
Dont ta race est si fière.
C’est dans la terre un trou,
Sans porte ni verrou,
Plongeant sous la bruyère.
COUPLET N°3 :
Il fait bien noir
Dans ton manoir,
Où la limace bave,
Et tu n’as pas, mignon,
Le moindre lumignon
Pour éclairer ta cave.
COUPLET N°4 :
Cela n’est rien.
Conduis-toi bien,
Sois modeste en gambades ;
Imite le grillon
Qui du fond du sillon
Te chante ses aubades.
COUPLET N°5 :
Que te dit-il,
Lui si gentil ?
Il dit : "D’une chaumine
Tenons-nous satisfaits,
Car les vastes souhaits
Font souvent grise mine." |

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- Raton : (1899)
Paroles et musique de Jean-Henri FABRE, écrit en français.
Harmonisation / Arrangement : Thibaut PLANTEVIN.
Le petit rat,
Le scélérat,
Qui mangeait mon fromage,
Le petit rat,
Le scélérat,
Au piège est pris, et c’est dommage.
Il était beau ;
Rose museau,
Moustache longue et fine.
Il était beau ;
Rose museau,
Ventre plus blanc que mousseline.
Or, sur le tard,
Un peu de lard
D’alléchante apparence,
Or, sur le tard,
Un peu de lard
Pendait au bout d’une potence.
Holà, holà !
Qu’est donc cela ?
C’est trouvaille nouvelle.
Holà, holà !
Qu’est donc cela ?
Se dit le rat, pauvre cervelle.
Cela sent bon,
C’est du jambon,
Fumé, mi-blanc, mi-rose.
Cela sent bon,
C’est du jambon,
Régalons-nous avec la chose.
Et l’imprudent
Porte la dent,
En allongeant l’échine,
Et l’imprudent
Porte la dent,
Sur le lardon de la machine.
Puis patatra !
Bin, boum, fri, fra !
La mécanique tombe,
Puis patatra !
Bin, boum, fri, fra !
Traquenard choit et rat succombe.
En aucun cas
Ne touchons pas
Aux choses inconnues.
En aucun cas
Ne touchons pas,
Et gare aux mains non prévenues. |

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Sources bibliographiques :
- "Les Carnets du Ventoux" n°65 (dossier sur Jean-Henri FABRE) (Ed. 2009)
- "Vies & mémoires de cigales" par Michel BOULARD et Bernard MONDON (Ed. Équinoxe 1995) ISBN : 2-84135-033-X
- "Moeurs des insectes" de Jean-Henri FABRE (Ed. C.P.M. 1988, pp.110-112) ISBN : 2-86673-067-3
- "Poésies françaises et provençales de Jean-Henri FABRE" par Pierre JULLIAN (Ed. Delagrave, Paris, 1925 puis Culture provençale et méridionale C.P.M., Raphèle-lès-Arles, 1980)
- "L'Oubreto prouvençalo dóu felibre di tavan rambaiado pèr J.-H. FABRE, traduction française en regard" de Jean-Henri FABRE (04/10/1908 >>> Ed. J.Roumanille, Avignon, 1909)
- "Armana prouvençau" de 1891 à 1909.
Liens officiels sur J-H.FABRE :
Discographie / Filmographie :
En 1913, le compositeur Albert ROUSSEL (1869-1937) compose un ballet-pantomime, sur un livret de Gilbert de VOISINS (1877-1939), inspiré des souvenirs entomologiques de J-H. FABRE : "Le festin de l'araignée".
PS : En provençal, "un fabre" signifie "forgeron, maréchal-ferrant, taillandier, bolet comestible ou potiron à chapeau noirâtre".
NB : Depuis 2008, Simon CALAMEL, Jean-Bernard PLANTEVIN et Thibaut PLANTEVIN ont monté une conférence-spectacle, théâtralisée et chantée, sur "Jean-Henri FABRE : le savant, le félibre, le musicien". Avec Paulin REYNARD, Lucie FAVIER et Alain LAYRISSE, ils font entendre une dizaine de chansons en polyphonie accompagnée.
Jean-Bernard PLANTEVIN a également composé et enregistré une chanson lui rendant hommage : "Moussu Jan-Enri" en 2012.
En 2023, à l'occasion du bicentenaire de la naissance de J-H.FABRE, le groupe vocal féminin "I'Anen" a fait un spectacle intitulé "Bestiouleto encantado" interprétant quelques chansons harmonisées.
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© Page réalisée avec l'aimable autorisation d'Isabelle et Magali FABRE et des responsables de l'Harmas de Sérignan.
© Traductions de Paulin REYNARD et Thibaut PLANTEVIN.
© Enregistrements des chansons par les élèves de 6e CHAM du collège de Vaison-la-Romaine.
© PLANTEVIN.